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Les leçons de l'économie sociale et solidaire


Mathieu Bouquet - Quel est aujourd'hui le poids de l'économie sociale et solidaire dans l'économie française ?
Jean-Marc Borello - Les évaluations oscillent entre 10 et 12 % du PIB et de l'emploi. Le secteur de l'ESS est délimité par le statut juridique des structures qui le composent : il regroupe les associations, les mutuelles, les coopératives et les fondations. La sphère financière, celle des banques, des assurances coopératives et des mutuelles, pèse très lourd. On y trouve des établissements très visibles : le Crédit agricole, le groupe BPCE, le Crédit mutuel, la MACIF, la MAIF... À ces géants, on peut ajouter d'autres mastodontes que sont les coopératives agricoles. Ces gros acteurs représentent la part la plus importante en termes purement économiques. Mais 80 % des emplois de l'ESS sont issus du monde associatif.
M. B. - Dans quels secteurs l'ESS s'est-elle prioritairement développée ?
J.-M. B. - Ses champs d'activité sont très diversifiés. J'ai cité la banque, l'assurance et les mutuelles de santé, sans oublier le secteur associatif, qui gère des crèches, des maisons de retraite ou des hôpitaux. On y retrouve également toutes les coopératives, que ce soit dans l'agriculture ou dans d'autres domaines moins connus, comme le bâtiment. Peu de gens le savent, mais Chèque Déjeuner est en termes de chiffre d'affaires, l'une des premières coopératives françaises, qui fonctionne d'ailleurs très bien. Le secteur est donc extrêmement large, tant du point de vue des structures juridiques que des activités.
M. B. - Est-il appelé à se développer ?
J.-M. B. - Évidemment, ne serait-ce que parce que les entités qui le composent sont en train de grandir. Dans la mutualité, un mouvement de concentration a déjà eu lieu, mais il faut s'attendre à une deuxième vague. Les nouveaux critères de solvabilité européens vont probablement entraîner un processus de rapprochement des mutuelles afin de leur permettre d'atteindre des tailles convenables.
Dans le secteur associatif, le phénomène est beaucoup plus récent mais, là aussi, la fusion est à l'ordre du jour. Le groupe SOS est un bon exemple de ce que peuvent donner des rapprochements associatifs : nous enregistrons 20 à 25 % de croissance annuelle, dont 10 % au titre de la croissance interne, le reste provenant d'une croissance externe due à des rapprochements et à des fusions.
Par ailleurs, la sociologie du secteur a profondément évolué. Il était animé à l'origine par de sympathiques autodidactes militants, anciens fonctionnaires, syndicalistes, qui ont créé ces entreprises. C'est d'ailleurs le cas du groupe SOS, par mon intermédiaire. Mais, aujourd'hui, les jeunes cadres sortent des meilleures institutions de l'enseignement supérieur, ce qui ouvre un avenir différent, mais intéressant et certainement porteur, à nos structures. Il y a une appétence des jeunes très diplômés pour notre secteur, qui sera à terme très bénéfique.
M. B. - Par son évolution, l'ESS pourrait donc être un facteur de croissance pour l'économie française ?
J.-M. B. - C'est certain. Je vous le disais, le groupe SOS a réalisé 20 % de croissance annuelle ces cinq …