Politique Internationale - La France accueillera prochainement la conférence mondiale sur le climat : qu'attendez-vous de ce grand rendez-vous ?
Jean Jouzel - Le fait d'accueillir la COP21 procure évidemment à la France une énorme visibilité, à laquelle nos dirigeants sont particulièrement sensibles. Un comité de pilotage a travaillé très en amont tandis qu'une conférence scientifique a été organisée tout spécialement en juillet pour analyser les enjeux majeurs de l'automne. Cette COP21 offre à nos concitoyens la possibilité d'adhérer davantage aux engagements en faveur de la protection de la planète. Mais un tel événement dépasse largement la sphère nationale. Il ne reste plus beaucoup de temps pour inscrire dans les faits le cap qui avait été tracé lors de la conférence de Copenhague en 2009. C'est le fameux chiffre de 2°C, auquel je souscris pleinement : il s'agit, concrètement, de limiter l'augmentation de la température moyenne à 2° par rapport au début de l'ère industrielle, c'est-à-dire au milieu du XIXe siècle. Je ne dirais pas que Paris est le rendez-vous de la dernière chance pour amorcer un tel programme, mais presque. Disons que nous sommes au pied du mur : les premières conférences climat n'avaient fixé que des objectifs qualitatifs, précieux certes mais sans déclinaison chiffrée. Depuis Copenhague, au contraire, le but est clairement défini.
P. I. - Scientifiques et politiques se rejoignent-ils sur les principaux objectifs de la COP21 ?
J. J. - Les deux communautés ont chacune un rôle bien établi. Nous, les scientifiques, devons répondre le plus précisément possible aux grandes questions que se posent les politiques et, par extension, l'ensemble de la population. S'agissant du dialogue entre les dirigeants et les climatologues, il s'est considérablement renforcé depuis quelques années. Un bon exemple en est le Grenelle de l'environnement qui s'est traduit par des engagements substantiels de la plupart des élus et des représentants du gouvernement. Encore aujourd'hui, dès qu'un sujet environnemental commence à prendre de l'importance, il n'est pas rare de voir un ministre s'en emparer immédiatement. Les politiques ont parfaitement compris que les problématiques écologiques ne pouvaient pas rester en dehors de leur champ de compétences. Dans ce contexte, la question se pose forcément d'une récupération un peu artificielle par les politiques de certaines thèses défendues par les scientifiques : à nous d'être vigilants sur les conditions de notre expression.
P. I. - Quelles actions doivent être entreprises en priorité ?
J. J. - Si rien n'est mis en oeuvre pendant la période 2015-2020, jamais l'objectif de 2 °C ne sera atteint. Les avis concordent sur la nécessité de réduire de 15 % les émissions de gaz à effet de serre au cours des cinq prochaines années, ce qui constitue une cible accessible. Le domaine d'intervention prioritaire concerne l'efficacité énergétique : avec quelques mesures bien ciblées, visant notamment à réguler la consommation d'énergie, des résultats probants peuvent être rapidement enregistrés. En aucun cas l'augmentation des émissions ne doit être considérée comme une fatalité. D'ailleurs, l'année 2014 s'est révélée plutôt encourageante : pour la première fois, …
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