Politique Internationale - A priori, il n'y pas grand-chose de commun entre les hydrocarbures et les énergies vertes. Qu'est-ce qui a poussé Total à prendre le virage du renouvelable ?
Arnaud Chaperon - Revenons un peu en arrière. Christophe de Margerie était un visionnaire : dès 2007-2008, il a perçu la montée en puissance de la transition énergétique et l'importance des enjeux climatiques. Et il a compris la nécessité, pour une entreprise comme Total, d'apporter des solutions à travers le développement des énergies renouvelables. Après examen des différentes filières, nous avons finalement opté pour le solaire et les biotechnologies, les deux énergies qui nous semblaient les plus prometteuses. Dans le cadre de ces nouveaux développements, Christophe de Margerie souhaitait que trois critères soient scrupuleusement respectés : d'abord, un positionnement sur des marchés à fort potentiel ; ensuite, la création de synergies avec l'ensemble du groupe. Ce pôle renouvelable ne devait surtout pas être quelque chose de désincarné par rapport à notre éventail d'activités : par exemple, la branche Marketing & Services est présente dans plus de 130 pays avec une forte activité dans de nombreuses régions ensoleillées où les synergies commerciales avec le solaire sont multiples, ce qui permet de progresser conjointement sur certains dossiers. Enfin, dernier critère particulièrement important : il fallait qu'à moyen terme ces énergies puissent se passer des subventions nécessaires à leur lancement et croître grâce à leurs seuls mérites dans le bouquet énergétique.
P. I. - Peut-on dresser un premier bilan ?
A. C. - Sous l'impulsion de Philippe Boisseau (directeur général de la branche Marketing & Services et des Énergies nouvelles de Total), le virage a été bien négocié : le solaire, notamment, est véritablement entré dans l'ADN du groupe. L'acquisition de l'américain SunPower nous a permis de nous positionner comme le deuxième acteur mondial du secteur et nous donne une grande légitimité. Pour les biotechnologies, le démarrage est un peu plus lent : Amyris, société californienne spécialisée dans la biologie synthétique, dont nous sommes actionnaires et partenaires, exploite une première unité industrielle au Brésil, mais les prix de revient des produits qui en sortent sont encore élevés et réservés par là même à des marchés de niche. Rien n'est figé : nous commençons à commercialiser un biocarburant aviation, déjà utilisé par Air France sur un vol hebdomadaire Toulouse-Paris, et la chimie de spécialité devrait bientôt pouvoir offrir de nouvelles opportunités aux biotechnologies. Nous continuons à travailler pour abaisser les coûts et améliorer la compétitivité de nos bioproduits.
P. I. - Énergies fossiles et renouvelables peuvent donc être poussées conjointement, et efficacement, au sein d'un même groupe...
A. C. - Au nom de quoi faudrait-il présenter - c'est malheureusement trop souvent le cas - les énergies traditionnelles et les énergies vertes comme antagonistes ? Pour certaines, elles sont complémentaires. Le gaz - qui, je vous le rappelle, est l'énergie fossile la moins polluante puisqu'elle émet deux fois moins de gaz à effet de serre que le charbon - présente une double complémentarité avec …
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