Jean-Claude Buhrer - Monsieur le Minister Mentor, en tant que " père de la nation ", quel regard portez-vous sur le travail accompli à Singapour en quarante ans d'indépendance ?
Lee Kuan Yew - Le travail n'est jamais achevé. Il doit sans cesse se poursuivre. Pour l'instant, je suis satisfait : nous avons rassemblé la meilleure équipe possible pour diriger le pays ; nous faisons face aux changements ; et nous devrions continuer à progresser durant les dix, quinze, voire vingt prochaines années dans la mesure où le contexte macro-économique nous est plutôt favorable. Les États-Unis resteront vraisemblablement la puissance dominante et maintiendront la sécurité. Quant à notre économie, elle est étroitement liée à trois grands pôles économiques : les États-Unis, le Japon et l'Union européenne. Nous commerçons également avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Et l'on assiste à l'émergence de nouveaux partenaires : la Chine et l'Inde. La croissance de ces deux pays va tirer toute l'Asie du Sud-Est vers le haut. Or Singapour se trouve au cœur de cette zone... Par sa position privilégiée, Singapour est appelée à jouer un rôle à part dans cette renaissance de l'Asie. Nous avons préparé avec la Chine et l'Inde des arrangements économiques spéciaux qui donneront à Pékin et à Delhi un accès particulier à nos produits et services. Tous ces éléments me rendent résolument optimiste : j'estime que, pour les années à venir, notre croissance devrait être assez confortable - peut-être de 4 à 6 % par an.
J.-C. B. - L'an dernier, vous avez déjà connu une croissance supérieure à 8 %...
L. K. Y. - Oui, mais n'oubliez pas que ce chiffre s'explique par des circonstances très particulières. En 2003, nous avions subi l'épidémie de SRAS (2) et tout était allé de travers : les aéroports et les hôtels étaient vides, personne n'osait sortir pour faire des achats, le tourisme et le commerce en avaient fait les frais... Les fondements même de notre économie en ont pâti. Conséquence : l'an dernier, en 2004, lorsque les choses sont redevenues normales, la reprise a été telle que nous avons connu une croissance supérieure à 8 %.
J.-C. B. - L'avenir de Singapour en tant que centre économique et financier passerait-il désormais par les casinos ? Alors que vous vous y étiez toujours opposé, vous avez déclaré, au printemps dernier, accepter l'idée de l'ouverture de plusieurs établissements de jeux...
L. K. Y. - Vous avez lu mon discours, je n'ai rien à ajouter (3). Le monde a changé ; mes sentiments, eux, n'ont pas changé, mais Singapour doit changer. L'Europe a évolué, l'Amérique a évolué, l'Australie a évolué... Pourquoi Singapour n'évoluerait-elle pas ? Je suis déjà vieux jeu, mes valeurs sont celles de quelqu'un qui est né dans les années 1920. Les gens dépensent davantage aujourd'hui, ce sont les enfants du baby-boom des années 1950 et 1960. Et la différence entre leur génération et la mienne est grande !
J.-C. B. - Quel rôle Singapour pourra-t-elle jouer face à de nouveaux défis et …
Lee Kuan Yew - Le travail n'est jamais achevé. Il doit sans cesse se poursuivre. Pour l'instant, je suis satisfait : nous avons rassemblé la meilleure équipe possible pour diriger le pays ; nous faisons face aux changements ; et nous devrions continuer à progresser durant les dix, quinze, voire vingt prochaines années dans la mesure où le contexte macro-économique nous est plutôt favorable. Les États-Unis resteront vraisemblablement la puissance dominante et maintiendront la sécurité. Quant à notre économie, elle est étroitement liée à trois grands pôles économiques : les États-Unis, le Japon et l'Union européenne. Nous commerçons également avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Et l'on assiste à l'émergence de nouveaux partenaires : la Chine et l'Inde. La croissance de ces deux pays va tirer toute l'Asie du Sud-Est vers le haut. Or Singapour se trouve au cœur de cette zone... Par sa position privilégiée, Singapour est appelée à jouer un rôle à part dans cette renaissance de l'Asie. Nous avons préparé avec la Chine et l'Inde des arrangements économiques spéciaux qui donneront à Pékin et à Delhi un accès particulier à nos produits et services. Tous ces éléments me rendent résolument optimiste : j'estime que, pour les années à venir, notre croissance devrait être assez confortable - peut-être de 4 à 6 % par an.
J.-C. B. - L'an dernier, vous avez déjà connu une croissance supérieure à 8 %...
L. K. Y. - Oui, mais n'oubliez pas que ce chiffre s'explique par des circonstances très particulières. En 2003, nous avions subi l'épidémie de SRAS (2) et tout était allé de travers : les aéroports et les hôtels étaient vides, personne n'osait sortir pour faire des achats, le tourisme et le commerce en avaient fait les frais... Les fondements même de notre économie en ont pâti. Conséquence : l'an dernier, en 2004, lorsque les choses sont redevenues normales, la reprise a été telle que nous avons connu une croissance supérieure à 8 %.
J.-C. B. - L'avenir de Singapour en tant que centre économique et financier passerait-il désormais par les casinos ? Alors que vous vous y étiez toujours opposé, vous avez déclaré, au printemps dernier, accepter l'idée de l'ouverture de plusieurs établissements de jeux...
L. K. Y. - Vous avez lu mon discours, je n'ai rien à ajouter (3). Le monde a changé ; mes sentiments, eux, n'ont pas changé, mais Singapour doit changer. L'Europe a évolué, l'Amérique a évolué, l'Australie a évolué... Pourquoi Singapour n'évoluerait-elle pas ? Je suis déjà vieux jeu, mes valeurs sont celles de quelqu'un qui est né dans les années 1920. Les gens dépensent davantage aujourd'hui, ce sont les enfants du baby-boom des années 1950 et 1960. Et la différence entre leur génération et la mienne est grande !
J.-C. B. - Quel rôle Singapour pourra-t-elle jouer face à de nouveaux défis et …
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