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DU BON USAGE DE L'UNION POUR LA MEDITERRANEE

« Bâtir une Union méditerranéenne » : quelques mois après le sommet de Paris du 13 juillet qui en a marqué le coup d'envoi, qu'en est-il de ce beau projet ? L'idée, lancée en pleine campagne présidentielle, n'était-elle qu'un argument électoral ? Ou bien s'agit-il d'un programme cohérent et consistant, visant à relancer un partenariat euro-méditerranéen vieux de dix ans, « rapiécé » par des ajouts et des correctifs successifs, et finalement en panne ? Quel est le contenu concret de ce projet après plusieurs mois d'échanges, de négociations, de compromis et de retouches successives ?Et pourquoi Nicolas Sarkozy en a-t-il fait l'un des deux axes majeurs de sa politique étrangère ? « Un grand rêve de civilisation », déclarait-il à Tanger en octobre 2007 (1). « Un pari », proposait-il à Constantine en décembre lors de sa visite d'État en Algérie (2). Faut-il y voir simplement l'expression d'une volonté élyséenne de s'inscrire dans l'Histoire comme le firent les pères fondateurs de l'Europe, ou bien faut-il y déceler quelque ambition stratégique inavouée d'une tout autre dimension? En réalité, plusieurs motivations interfèrent dans le projet présidentiel.
Quelle « Union méditerranéenne » ?
« La géographie de la mondialisation pousse l'Europe à imaginer une stratégie euro-africaine dont la Méditerranée sera fatalement le pivot (...). [Mais] il ne s'agit pas de faire seulement du Bassin méditerranéen un pont entre le Nord et le Sud. Il s'agit d'en faire un foyer de paix, de culture, de démocratie (...) d'où naîtra (...) le destin commun de l'Europe, du Moyen-Orient et de l'Afrique. » Le candidat à la présidence de la République définissait ainsi l'espace méditerranéen, lors du discours prononcé à Toulon en février 2007, en pleine campagne électorale (3). La Méditerranée à la fois trait d'union entre les continents et les cultures et creuset d'un nouvel espace fusionnel entre ses trois civilisations riveraines. Un lieu de synthèse, générateur de paix et de prospérité partagée. L'objectif est tracé et, à Tanger, le président français livre le fond de sa pensée en affirmant que le but « est de jeter les bases d'une union politique, économique et culturelle, fondée sur le principe d'une égalité stricte entre les nations d'une même mer ». Cette mer a vocation à devenir le lieu de rencontre des cultures, des peuples et des activités qui l'animent, un espace homogène et cohérent de libre-échange, de partage, de paix et de développement mutuel.
Une démarche neuve pour un projet neuf
Le projet est ambitieux. Est-il, pour autant, novateur ? Le président français en semble convaincu lorsqu'il affirme, toujours à Tanger : « Nous ne ferons pas d'emblée l'Union méditerranéenne sur le modèle actuel de l'Union européenne avec ses institutions, ses administrations, son degré élevé d'intégration politique, juridique, économique. » Et d'ajouter un peu plus loin : « Ce sera une expérience originale et unique car, à terme, l'Union méditerranéenne ne ressemblera pas à l'Union européenne. » Et pour cause : « L'Union ne sera pas fondée sur le principe de l'intégration de ses pays …