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GEORGIE: LE REVE BRISE

« Quand les hordes du XXIe siècle se sont, comme par le passé, avancées vers la Géorgie, la Géorgie s'est levée ; la Géorgie s'est battue et continuera à se battre ; la Géorgie s'est unie. (...) Elle n'est pas seule, le monde civilisé est avec elle. »C'est en ces termes que le président géorgien Mikheïl Saakachvili s'adressait à la foule réunie à Tbilissi le 1er septembre 2008 tandis que se tenait le Conseil européen extraordinaire consacré à la crise géorgienne. Un discours qui révèle l'un des fondements de l'identité de cette petite nation soumise à une menace multiséculaire et qui cherche désespérément une protection extérieure dans laquelle elle voit sa seule chance de survie. C'est cette vision qui explique que, depuis l'indépendance obtenue en 1991, l'objectif prioritaire des autorités géorgiennes a été de s'affranchir de la Russie, désormais perçue - non sans raison - comme la principale menace à sa sécurité.
C'est à Moscou, en effet, qu'il faut chercher les principales clés de la première intervention militaire russe en territoire étranger depuis l'invasion de l'Afghanistan en 1979. Le Kremlin voulait la guerre, les experts indépendants s'accordent sur ce point (1). Il s'y préparait au moins depuis avril 2008 : c'est alors, après avoir annoncé que la reconnaissance par la communauté internationale de l'indépendance du Kosovo allait créer un précédent, que Vladimir Poutine, encore président, signe un décret établissant des relations officielles avec les deux régions séparatistes géorgiennes, l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie. Dans la foulée, la Russie augmente son contingent de maintien de la paix déployé en Abkhazie depuis une quinzaine d'années sous mandat de la Communauté des États indépendants et avec l'aval de l'ONU. Fin mai, elle procède à la restauration du chemin de fer reliant Sotchi à la ville abkhaze d'Otchamtchira (lors du conflit du mois d'août, c'est cette voie qui acheminera les 9 000 soldats russes dépêchés en Abkhazie). Enfin, à la fin du mois de juillet, son armée se livre à des exercices militaires à quelques kilomètres de la frontière séparant la Russie de l'Ossétie du Sud. Moscou n'attendait qu'un prétexte pour passer à l'action, et les Géorgiens ont raison de dire que s'ils n'avaient pas répondu aux provocations russes et ossètes (plusieurs villages peuplés de Géorgiens situés en Ossétie avaient été pilonnés), il est fort probable qu'il y en aurait eu d'autres. Il ne faut pas oublier, cependant, que la responsabilité des Américains - qui ont armé les Géorgiens - est également engagée, et que de nombreuses questions demeurent quant au rôle que Washington a joué dans le déclenchement des hostilités.
On aurait tort, toutefois, de n'analyser cette crise qu'en fonction des intérêts des « grands acteurs » et de négliger les processus internes à la Géorgie. Car le conflit est également le produit des orientations décidées par les dirigeants de Tbilissi. Des orientations qui prennent leur source à la fois dans l'histoire longue de la région et dans l'évolution que celle-ci a connue au cours des quinze dernières années.
La « guerre des …