Créé dans les années 1980 dans le fracas de la guerre civile libanaise grâce au soutien de l'Iran, le Hezbollah est aujourd'hui un acteur central de la scène politique du pays du Cèdre. C'est même le parti le mieux structuré et le plus discipliné. Il est représenté au Parlement et au gouvernement ; il dirige des municipalités ; il gère des mosquées, des hôpitaux et des écoles ; il dispose d'une chaîne de télévision (Al-Manar), etc. Si bien que certains observateurs qualifient le Hezbollah d'« État dans l'État ». Sa puissance, il la tient surtout de sa branche armée, qui a infligé de lourdes pertes à l'armée israélienne lors de la guerre de juillet-août 2006. Les miliciens chiites avaient alors réussi à tirer plus de 4 000 roquettes sur l'État hébreu.Le parti est dirigé par un leader charismatique, cheikh Hassan Nasrallah, un homme qui vit entouré de mesures de sécurité draconiennes par crainte d'un attentat. Les dirigeants du Hezbollah sont difficiles à rencontrer. L'entretien que nous a accordé Mohammed Raad n'en prend que plus de valeur. Ce membre de la direction politique du parti est considéré comme le stratège en politique intérieure d'Hassan Nasrallah. C'est lui qui a conduit, pour le compte du Hezbollah, les négociations de Doha qui ont mis fin à la crise de mai dernier.
C. C. Christian Chesnot - Quelle analyse faites-vous de la crise de mai dernier, qui a vu le Hezbollah prendre le contrôle de Beyrouth en 48 heures ?
Mohammed Raad - Si cette crise a éclaté en mai dernier, elle avait, en réalité, commencé depuis le 11 novembre 2006. Ce jour-là, les six ministres issus de la minorité parlementaire ont rendu leur portefeuille pour protester contre le comportement de l'équipe majoritaire au gouvernement de l'époque, qui travaillait la main dans la main avec l'agresseur sioniste et américain. Par surcroît, cette équipe, dite « du 14 mars », gouvernait le pays selon la vision occidentale de la démocratie - une vision fondée sur la domination de la majorité. Or cette conception politique est contraire à la Constitution libanaise. Constitutionnellement, en effet, la règle de la majorité ne s'applique, dans notre pays, que pour gérer les affaires mineures. Pas pour les grandes décisions nationales. Pour celles-ci, c'est la règle du consensus qui s'impose. Mais l'équipe majoritaire voulait coûte que coûte continuer à prendre toutes les décisions seule, sans consulter l'opposition... y compris sur des questions décisives pour l'avenir du Liban.
C. C. - Le mouvement du 14 mars estime que le Hezbollah doit déposer les armes...
M. R. - La guerre de juillet 2006 est intervenue après un dialogue national entre toutes les parties libanaises. Nous avons compris que le but essentiel de ce dialogue était de convaincre le Hezbollah de se transformer en parti politique classique et, donc, d'accepter d'être désarmé. Ce calcul a échoué. Notre position à nous était parfaitement claire. Voici ce que nous avons dit : nous discuterons du désarmement du Hezbollah dès l'instant où nous serons certains que le pays dispose de sa propre stratégie de défense nationale, c'est-à-dire que l'État est véritablement capable de protéger ses citoyens et son territoire. La majorité a estimé que cette proposition ne correspondait pas à son projet.
Quoi qu'il en soit, ce qui a fait éclater la crise en mai, c'est la décision stupide qu'a prise le gouvernement en décidant de s'attaquer au réseau logistique de la résistance. Il ne s'agissait pas seulement d'interdire à la résistance de posséder son propre réseau de communication interne ; le pouvoir voulait également traduire en justice les chefs de l'opposition : il a même envoyé au Conseil de sécurité de l'ONU une plainte les accusant d'avoir violé la souveraineté du pays ! Il s'agissait d'une nouvelle déclaration de guerre contre la résistance. Nous avons essayé d'apaiser les choses. En vain. C'est pourquoi nous avons voulu créer une pression populaire en demandant à nos partisans de se joindre aux cortèges d'un mouvement de protestation syndical prévu de longue date. Mais l'État a fait ouvrir le feu sur les manifestants et les syndicalistes avec l'aide des nervis des mouvements de la majorité.
C. C. - Quels mouvements accusez-vous particulièrement ?
M. R. - Nous avions des renseignements qui indiquaient que les milices du Courant du futur de Saad Hariri voulaient se déployer dans les rues. Même si …
C. C. Christian Chesnot - Quelle analyse faites-vous de la crise de mai dernier, qui a vu le Hezbollah prendre le contrôle de Beyrouth en 48 heures ?
Mohammed Raad - Si cette crise a éclaté en mai dernier, elle avait, en réalité, commencé depuis le 11 novembre 2006. Ce jour-là, les six ministres issus de la minorité parlementaire ont rendu leur portefeuille pour protester contre le comportement de l'équipe majoritaire au gouvernement de l'époque, qui travaillait la main dans la main avec l'agresseur sioniste et américain. Par surcroît, cette équipe, dite « du 14 mars », gouvernait le pays selon la vision occidentale de la démocratie - une vision fondée sur la domination de la majorité. Or cette conception politique est contraire à la Constitution libanaise. Constitutionnellement, en effet, la règle de la majorité ne s'applique, dans notre pays, que pour gérer les affaires mineures. Pas pour les grandes décisions nationales. Pour celles-ci, c'est la règle du consensus qui s'impose. Mais l'équipe majoritaire voulait coûte que coûte continuer à prendre toutes les décisions seule, sans consulter l'opposition... y compris sur des questions décisives pour l'avenir du Liban.
C. C. - Le mouvement du 14 mars estime que le Hezbollah doit déposer les armes...
M. R. - La guerre de juillet 2006 est intervenue après un dialogue national entre toutes les parties libanaises. Nous avons compris que le but essentiel de ce dialogue était de convaincre le Hezbollah de se transformer en parti politique classique et, donc, d'accepter d'être désarmé. Ce calcul a échoué. Notre position à nous était parfaitement claire. Voici ce que nous avons dit : nous discuterons du désarmement du Hezbollah dès l'instant où nous serons certains que le pays dispose de sa propre stratégie de défense nationale, c'est-à-dire que l'État est véritablement capable de protéger ses citoyens et son territoire. La majorité a estimé que cette proposition ne correspondait pas à son projet.
Quoi qu'il en soit, ce qui a fait éclater la crise en mai, c'est la décision stupide qu'a prise le gouvernement en décidant de s'attaquer au réseau logistique de la résistance. Il ne s'agissait pas seulement d'interdire à la résistance de posséder son propre réseau de communication interne ; le pouvoir voulait également traduire en justice les chefs de l'opposition : il a même envoyé au Conseil de sécurité de l'ONU une plainte les accusant d'avoir violé la souveraineté du pays ! Il s'agissait d'une nouvelle déclaration de guerre contre la résistance. Nous avons essayé d'apaiser les choses. En vain. C'est pourquoi nous avons voulu créer une pression populaire en demandant à nos partisans de se joindre aux cortèges d'un mouvement de protestation syndical prévu de longue date. Mais l'État a fait ouvrir le feu sur les manifestants et les syndicalistes avec l'aide des nervis des mouvements de la majorité.
C. C. - Quels mouvements accusez-vous particulièrement ?
M. R. - Nous avions des renseignements qui indiquaient que les milices du Courant du futur de Saad Hariri voulaient se déployer dans les rues. Même si …
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