On célèbre, ce trimestre, les trente ans de l'influente revue Politique Internationale. Mais on célèbre, aussi, les dix ans de l'euro. J'ai eu le privilège de participer, depuis le début, à cette grande aventure. D'abord en tant que vice-président de la Banque centrale européenne (BCE), puis en tant que gouverneur de la Banque de France et, à ce titre, membre du Conseil des gouverneurs de la BCE. Comme tous les Français, j'éprouve une immense fierté à disposer aujourd'hui d'une des deux premières monnaies mondiales. Européen de coeur et de raison, j'ai la chance de voir au quotidien, dans les fonctions que j'exerce au sein de l'Eurosystème, combien l'euro renforce notre solidarité et notre force dans un monde troublé. Loin d'être le symbole d'une Europe livrée à des puissances financières désincarnées, l'euro, notre monnaie, témoigne d'une Europe à visage humain, promotrice d'un rapprochement inédit entre ses peuples. Par l'origine même de sa création et les fondements de son fonctionnement, la monnaie unique se veut et se révèle, en effet, comme un instrument de stabilité, de prospérité et de paix en Europe, voire dans le monde.
L'Europe, ou la paix par l'intégration économique et monétaire
La construction européenne incarne, de manière emblématique, un acte d'espérance - je dirais presque un acte de foi - dans la paix. Elle est la réponse, on le sait, au traumatisme issu des déchirures survenues au cours de siècles de luttes, de guerres qualifiées de « fratricides » qui ont culminé avec les deux conflits mondiaux. Elle a voulu rendre ces déchirures indignes, voire illégales, et insuffler la conscience d'une fraternité entre les peuples européens.
Les premiers projets de construction européenne - ceux de l'abbé de Saint-Pierre ou de Kant, par exemple -, de nature principalement politique, ont très tôt défini celle-ci comme un antidote au conflit, comme un refus de la guerre. Les pères fondateurs de l'Union européenne ont eu, eux aussi, pour objectif, à l'instar de Kant, de faire en sorte que la guerre devienne « non seulement impensable, mais matériellement impossible ». Conscients, toutefois, que la construction d'une Europe politique était aléatoire et sans doute prématurée, ils ont choisi de privilégier les avancées de l'intégration économique, certains que l'Europe se ferait « par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait », selon l'expression de Robert Schuman (1). Depuis la naissance du Marché commun, cette logique fonctionnaliste met l'économie au service d'un but éminemment politique, et même moral : rendre irréversible la réconciliation entre les peuples européens. La création de la monnaie unique s'est pleinement inscrite dans cette vision. Dans le contexte spécifique de l'unification allemande, l'un des pères de l'euro, Helmut Kohl, a présenté la réalisation de l'Union monétaire comme une condition de « la paix pour le xxie siècle ».
À l'origine de l'Union monétaire, il y avait cette conscience que l'évolution erratique des taux de change des monnaies menace la prospérité de pays déjà très intégrés économiquement, et qu'elle peut être source de difficultés et d'instabilité politique. C'est bien, d'ailleurs, …
L'Europe, ou la paix par l'intégration économique et monétaire
La construction européenne incarne, de manière emblématique, un acte d'espérance - je dirais presque un acte de foi - dans la paix. Elle est la réponse, on le sait, au traumatisme issu des déchirures survenues au cours de siècles de luttes, de guerres qualifiées de « fratricides » qui ont culminé avec les deux conflits mondiaux. Elle a voulu rendre ces déchirures indignes, voire illégales, et insuffler la conscience d'une fraternité entre les peuples européens.
Les premiers projets de construction européenne - ceux de l'abbé de Saint-Pierre ou de Kant, par exemple -, de nature principalement politique, ont très tôt défini celle-ci comme un antidote au conflit, comme un refus de la guerre. Les pères fondateurs de l'Union européenne ont eu, eux aussi, pour objectif, à l'instar de Kant, de faire en sorte que la guerre devienne « non seulement impensable, mais matériellement impossible ». Conscients, toutefois, que la construction d'une Europe politique était aléatoire et sans doute prématurée, ils ont choisi de privilégier les avancées de l'intégration économique, certains que l'Europe se ferait « par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait », selon l'expression de Robert Schuman (1). Depuis la naissance du Marché commun, cette logique fonctionnaliste met l'économie au service d'un but éminemment politique, et même moral : rendre irréversible la réconciliation entre les peuples européens. La création de la monnaie unique s'est pleinement inscrite dans cette vision. Dans le contexte spécifique de l'unification allemande, l'un des pères de l'euro, Helmut Kohl, a présenté la réalisation de l'Union monétaire comme une condition de « la paix pour le xxie siècle ».
À l'origine de l'Union monétaire, il y avait cette conscience que l'évolution erratique des taux de change des monnaies menace la prospérité de pays déjà très intégrés économiquement, et qu'elle peut être source de difficultés et d'instabilité politique. C'est bien, d'ailleurs, …
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