Les Grands de ce monde s'expriment dans

QUE RESTE-T-IL DES GRANDES PUISSANCES ?

Ces dernières années de la décennie 1970, que le trentième anniversaire de Politique Internationale nous donne l'occasion d'évoquer, comme elles sont loin ! C'était avant la chute du mur de Berlin et celle des deux tours de Wall Street ; avant la fin de la guerre froide et l'ère du terrorisme globalisé ; avant la réunification de l'Allemagne ; avant la montée en puissance de la Chine et des pays émergents ; avant que le changement climatique et le problème de l'énergie ne s'imposent à tous comme préoccupations majeures. Et pourtant : les États-Unis étaient dirigés par un président démocrate qui voulait rétablir la réputation de l'Amérique ternie par la guerre du Vietnam et par le scandale du Watergate. Ils étaient en conflit avec l'Iran qui leur tenait tête au point de contribuer significativement à la défaite de Jimmy Carter à l'élection présidentielle. La Russie envahissait l'Afghanistan ; le président français, Valéry Giscard d'Estaing, s'efforçait, en rencontrant Léonid Brejnev, d'obtenir le retrait des troupes russes et était accusé par le chef de l'opposition, François Mitterrand, de jouer les petits télégraphistes. Les États-Unis appliquaient des sanctions économiques et boycottaient les Jeux olympiques de Moscou. Ils n'étaient pas suivis par les Européens - en particulier par les Allemands qui craignaient de compromettre leurs relations avec l'URSS. Mais c'était le chancelier Schmidt qui sonnait l'alarme sur les fusées SS20. La Chine avait entamé, avec Deng Xiaoping, ses réformes économiques et sa spectaculaire croissance, mais ne négligeait pas, au passage, d'« infliger une punition militaire au Vietnam » qui lui avait « manqué de respect », et soutenait, au Cambodge, le régime génocidaire des Khmers rouges. Quant à l'Europe, elle progressait en direction de l'Union monétaire ; le duo Giscard d'Estaing-Schmidt suscitait l'espoir d'une politique étrangère et de défense commune, mais l'Europe restait divisée sur l'attitude à adopter vis-à-vis des deux Grands et des conflits asiatiques.Gardons-nous de conclure trop rapidement que rien n'a changé sous le soleil. On est cependant frappé par le nombre d'événements ou de comportements qui semblent étrangement familiers à quelqu'un qui a observé les trente dernières années tant ils lui rappellent de vieux souvenirs. C'est pourquoi l'exercice qui consiste à se demander, à propos des différents acteurs, en quoi ils ont changé et en quoi ils sont restés les mêmes, ne semble pas dénué d'intérêt. Surtout si l'on veut comprendre la guerre russo-géorgienne et ses suites qui constituent, avec l'élection présidentielle américaine et la guerre d'Afghanistan, les principaux sujets internationaux de cet automne.
Ni tout à fait les mêmes...
Celui de ces acteurs qui a, à la fois, le plus et le moins changé, c'est la Russie. Le plus, puisque l'Union soviétique n'existe plus, pas plus que son empire, que les milliardaires y ont remplacé les apparatchiks, que ses troupes ne sont plus au centre de l'Europe. Le moins, parce que les anciens du KGB sont toujours au pouvoir sous un autre nom, que les dirigeants revendiquent l'héritage de Staline et de l'Union soviétique autant que celui des tsars, qu'ils …