Jean-Jacques Lafaye - Votre Altesse, en tant que chef spirituel des communautés ismaéliennes du monde entier, vous exercez une influence indiscutable sur la scène internationale. Pourtant, vous ne souhaitez pas être considéré comme un acteur politique...
Karim Aga Khan - ...ou comme un politicien. De mon point de vue, même si la foi et les États doivent entretenir des rapports de collaboration et d'estime, le religieux et le politique sont deux choses bien distinctes.
J.-J. L. - Vous incarnez l'institution de l'imamat. Pour vos coreligionnaires, vous êtes le « seigneur » et le « maître ». Comment cette autorité se traduit-elle ?
K. A. K. - En islam - sunnite comme chiite -, l'imam est responsable à la fois de la qualité de vie de ceux qui se réfèrent à lui et de leur pratique religieuse. On ne retrouve donc pas la division qui existe, par exemple, dans l'interprétation chrétienne entre le matériel et le spirituel. La responsabilité d'un imam couvre les deux domaines. Dès lors, ses soucis concernent la sécurité des fidèles, la libre pratique de leur croyance et la qualité de vie que je viens d'évoquer. Je le répète, l'imamat est une institution dotée d'une double mission : assurer la qualité de vie et l'interprétation de la foi.
L'autorité religieuse de l'imam Ismaeli remonte à l'origine du chiisme en islam, quand le prophète Mahomet a mandaté son gendre Ali pour perpétuer son enseignement au sein de la communauté musulmane. Cette autorité se transmet héréditairement aux descendants d'Ali et les Ismaéliens sont les seuls des chiites qui disposent d'un imam vivant - en l'occurrence, moi. Les autres chiites - les duodécimains - révèrent un imam qui est « caché » et qui, le jour du Jugement dernier, reviendra pour participer aux décisions ultimes. Ce qui rend notre imamat unique, c'est la présence de cet imam vivant. Chez les sunnites, c'est tout à fait différent dans la mesure où l'on ne reconnaît pas la notion de continuité d'une autorité religieuse liée à la famille du Prophète.
J.-J. L. - Votre communauté, présente à travers le monde, est donc unique au sein de l'islam...
K. A. K. - Elle est effectivement unique puisqu'elle ne reconnaît qu'un seul imam, lequel exerce son autorité sur l'ensemble des Ismaéliens, partout sur la planète (il y a des communautés ismaéliennes au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie du Sud-Ouest, en Asie centrale, au Canada, aux États-Unis, en Europe...). Cette diversité se traduit dans les traditions culturelles et linguistiques, et même dans une pratique religieuse hétérogène ; mais la reconnaissance d'un seul imam réunit tous les Ismaéliens.
J.-J. L. - Vous êtes le tenant d'un islam humaniste. Comment réagissez-vous aux violents délires verbaux de certains leaders politico-religieux du Moyen-Orient et aux actes terroristes commis au nom de votre religion ?
K. A. K. - J'ai fait des études d'histoire (en particulier à Harvard) et je me sens très mal à l'aise quand je vois que l'on rend la religion responsable de tous les problèmes humains que l'on …
Karim Aga Khan - ...ou comme un politicien. De mon point de vue, même si la foi et les États doivent entretenir des rapports de collaboration et d'estime, le religieux et le politique sont deux choses bien distinctes.
J.-J. L. - Vous incarnez l'institution de l'imamat. Pour vos coreligionnaires, vous êtes le « seigneur » et le « maître ». Comment cette autorité se traduit-elle ?
K. A. K. - En islam - sunnite comme chiite -, l'imam est responsable à la fois de la qualité de vie de ceux qui se réfèrent à lui et de leur pratique religieuse. On ne retrouve donc pas la division qui existe, par exemple, dans l'interprétation chrétienne entre le matériel et le spirituel. La responsabilité d'un imam couvre les deux domaines. Dès lors, ses soucis concernent la sécurité des fidèles, la libre pratique de leur croyance et la qualité de vie que je viens d'évoquer. Je le répète, l'imamat est une institution dotée d'une double mission : assurer la qualité de vie et l'interprétation de la foi.
L'autorité religieuse de l'imam Ismaeli remonte à l'origine du chiisme en islam, quand le prophète Mahomet a mandaté son gendre Ali pour perpétuer son enseignement au sein de la communauté musulmane. Cette autorité se transmet héréditairement aux descendants d'Ali et les Ismaéliens sont les seuls des chiites qui disposent d'un imam vivant - en l'occurrence, moi. Les autres chiites - les duodécimains - révèrent un imam qui est « caché » et qui, le jour du Jugement dernier, reviendra pour participer aux décisions ultimes. Ce qui rend notre imamat unique, c'est la présence de cet imam vivant. Chez les sunnites, c'est tout à fait différent dans la mesure où l'on ne reconnaît pas la notion de continuité d'une autorité religieuse liée à la famille du Prophète.
J.-J. L. - Votre communauté, présente à travers le monde, est donc unique au sein de l'islam...
K. A. K. - Elle est effectivement unique puisqu'elle ne reconnaît qu'un seul imam, lequel exerce son autorité sur l'ensemble des Ismaéliens, partout sur la planète (il y a des communautés ismaéliennes au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie du Sud-Ouest, en Asie centrale, au Canada, aux États-Unis, en Europe...). Cette diversité se traduit dans les traditions culturelles et linguistiques, et même dans une pratique religieuse hétérogène ; mais la reconnaissance d'un seul imam réunit tous les Ismaéliens.
J.-J. L. - Vous êtes le tenant d'un islam humaniste. Comment réagissez-vous aux violents délires verbaux de certains leaders politico-religieux du Moyen-Orient et aux actes terroristes commis au nom de votre religion ?
K. A. K. - J'ai fait des études d'histoire (en particulier à Harvard) et je me sens très mal à l'aise quand je vois que l'on rend la religion responsable de tous les problèmes humains que l'on …
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