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LE TANDEM SINO-RUSSE, UN DEFI POUR L'OCCIDENT ?

Le débat va bon train : selon de nombreux experts et dirigeants politiques européens et américains, l'Occident serait en train de perdre son rang de leader de la communauté internationale au bénéfice des « puissances émergentes » (1). Celles-ci, portées par une vitalité économique et/ou démographique que les pays occidentaux ne peuvent que leur envier, exigent de jouer un rôle de plus en plus important dans les affaires du monde. L'affirmation du duo diplomatique Chine-Russie fait partie des éléments qui nourrissent ces analyses. Depuis le milieu des années 1990, les deux pays n'ont cessé de réclamer un ordre international plus « juste » - c'est-à-dire, selon eux, moins soumis à la volonté des Américains et des Européens.Quelques hauts responsables occidentaux disent observer cette entente sino-russe d'un oeil favorable. Ainsi, en mai 2009, lors du sommet UE-Russie tenu à Khabarovsk, José Manuel Barroso se félicitait du réchauffement des relations entre la Russie et la Chine, deux partenaires majeurs de Bruxelles (2). Mais l'avis du président de la Commission européenne tranche avec la majorité des propos et des publications alarmistes qui ont cours en Occident. Ces commentaires redoutent les possibles effets négatifs de la consolidation du « partenariat stratégique » proclamé en 1996 par Moscou et Pékin ou décrivent l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), créée en 2001 à leur initiative, comme une future « Otan orientale ». Bon nombre d'observateurs soupçonnent la Russie et la Chine de souhaiter l'échec de la coalition occidentale en Afghanistan, voire d'être prêtes à contribuer à cet échec de peur qu'un succès mine leur influence en Asie centrale. D'autres craignent les conséquences que leur rapprochement pourrait avoir pour la sécurité énergétique de l'Europe. Le pays le plus étendu de la planète serait-il en train de s'entendre avec le pays le plus peuplé pour former une alliance soudée face à l'Occident ? La réalité est plus contrastée.
Entente sino-russe sur fond de tensions avec l'Occident
Il est vrai que l'actualité récente semble aller dans le sens de ces inquiétudes. Les spécialistes occidentaux remarquent que la doctrine militaire que Moscou a adoptée en février 2010 inclut l'Otan et différents aspects de la politique américaine dans la liste des « dangers militaires » qui pèsent sur la Russie, mais ne fait aucune mention de la Chine. Quelques mois plus tôt, l'ambassadeur de Russie en Chine avait semblé justifier par avance ce contraste : « La RPC, à la différence de certains autres États, ne conduit pas une politique délibérément anti-russe, ne déclare pas siens des territoires nous appartenant, ne rapproche pas de nos frontières une infrastructure de blocs militaro-politiques, n'installe pas des régimes inamicaux sur le périmètre de ces mêmes frontières ; au contraire, elle nous soutient sur une série de questions clés de politique intérieure et étrangère » (3). Dans le même temps, la politique de « redémarrage » des relations russo-américaines poursuivie par le président Obama n'a pas encore produit de résultats très tangibles ; et la tension monte entre Pékin et Washington (annonce, en janvier 2010, …