L'ouverture de l'Exposition universelle de Shanghai le 1er mai 2010 constitue le point d'orgue d'une année 2009 qui a marqué un tournant dans l'affirmation des ambitions planétaires de la Chine. Forte de la bonne résistance de son économie face à la crise - une croissance de 8,7 % contre une récession de 2,4 % aux États-Unis et de 5 % au Japon -, elle a clairement signifié que son aval était désormais indispensable sur les grands dossiers internationaux.En avril 2009, le président Hu Jintao, sûr de lui et déterminé, a dominé la réunion du G20 à Londres ; son premier ministre Wen Jiabao n'a pas été en reste lors du sommet de Copenhague en décembre... à cette différence près que l'esprit de concertation manifesté lors du G20 pour juguler la crise mondiale avait disparu dans le second cas, laissant la place à un refus inflexible de tout accord contraignant sur le changement climatique. Le message était clair : pour les questions d'environnement comme pour d'autres (politique de change, droits de l'homme, Tibet...), la Chine entend faire respecter sa souveraineté et ne pas céder à la pression étrangère. Si réformes il doit y avoir, elles se feront au rythme que Pékin jugera compatible avec ses propres objectifs : poursuite d'une croissance robuste, intégrité territoriale, leadership du Parti, etc. Aux yeux de certains observateurs, la conjonction de cette détermination teintée d'arrogance et de succès économiques spectaculaires (1) est le signe que Pékin se pose déjà comme l'interlocuteur incontournable des États-Unis dans une sorte de directoire mondial ; ce G2 signerait la fin de l'hégémonie américaine, étape provisoire avant qu'une Chine conquérante soit en mesure d'occuper sa « juste place » dans le monde - c'est-à-dire, à terme, la première.
Un rappel historique n'est pas inutile pour tempérer l'emballement médiatique que suscite l'émergence de la puissance chinoise. Dans les années 1980 déjà, rien ne semblait devoir freiner la flamboyante envolée de la puissance industrielle, technologique et financière du Japon face au déclin américain. Le Japon allait conquérir le monde et s'attaquait aux symboles de l'Amérique - Rockefeller Center, CBS Records, Universal MCA, etc. On sait ce qu'il en advint, suite à l'envolée du yen et de la spéculation durant la seconde partie des années 1980 puis à l'inertie politique de la décennie suivante. À Pékin, cette expérience japonaise des années 1980 et 1990 a été scrutée à la loupe et les leçons en ont été tirées. Contrairement à l'impression que peuvent donner certaines attitudes ou déclarations récentes, ce n'est pas l'hybris qui guide les dirigeants chinois mais, au contraire, une conscience aiguë des défis auxquels le pays doit faire face s'il veut recouvrer son rang après une éclipse de deux siècles. Le théoricien du Parti communiste chinois (PCC) Zeng Bijian résumait ces défis en 2004 par le « principe de multiplication et de division » : « Tous les problèmes sont multipliés par 1,3 milliard [de personnes] et tous les succès sont divisés par le même nombre » (2).
Ces défis sont de …
Un rappel historique n'est pas inutile pour tempérer l'emballement médiatique que suscite l'émergence de la puissance chinoise. Dans les années 1980 déjà, rien ne semblait devoir freiner la flamboyante envolée de la puissance industrielle, technologique et financière du Japon face au déclin américain. Le Japon allait conquérir le monde et s'attaquait aux symboles de l'Amérique - Rockefeller Center, CBS Records, Universal MCA, etc. On sait ce qu'il en advint, suite à l'envolée du yen et de la spéculation durant la seconde partie des années 1980 puis à l'inertie politique de la décennie suivante. À Pékin, cette expérience japonaise des années 1980 et 1990 a été scrutée à la loupe et les leçons en ont été tirées. Contrairement à l'impression que peuvent donner certaines attitudes ou déclarations récentes, ce n'est pas l'hybris qui guide les dirigeants chinois mais, au contraire, une conscience aiguë des défis auxquels le pays doit faire face s'il veut recouvrer son rang après une éclipse de deux siècles. Le théoricien du Parti communiste chinois (PCC) Zeng Bijian résumait ces défis en 2004 par le « principe de multiplication et de division » : « Tous les problèmes sont multipliés par 1,3 milliard [de personnes] et tous les succès sont divisés par le même nombre » (2).
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