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BALKANS OCCIDENTAUX : LE LONG CHEMIN VERS L'UNION EUROPÉENNE

En mars 1989, l'économiste croate Ante Markovi? devenait premier ministre de la République socialiste fédérative de Yougoslavie. Il engagea aussitôt un ambitieux programme de réformes économiques et parvint à stabiliser la monnaie, à juguler l'inflation et à accélérer la privatisation des entreprises en ouvrant leur capital aux employés. L'objectif d'Ante Markovi? était non seulement de sauver la Fédération mais, aussi, de la rapprocher de l'Union européenne. Hélas, son oeuvre fut réduite à néant par les dirigeants nationalistes qui avaient déjà pris le pouvoir dans les différentes républiques fédérées, en premier lieu par Slobodan Milo?evi?, maître de la Serbie, qui sabota directement la politique économique du centre en faisant tourner la planche à billets. Markovi? ne reçut pas plus d'aide de la part du nouveau président croate, Franjo Tudjman, désireux d'obtenir au plus vite l'indépendance de son pays.Le premier ministre yougoslave comptait sur le soutien des pays occidentaux, en particulier sur celui de la Communauté économique européenne qui aurait peut-être pu lui offrir une chance de réussir, si elle avait accepté d'élaborer une perspective d'adhésion pour la Fédération de Yougoslavie. Cet appui ne vint jamais et le projet politique d'Ante Markovi? fut mis à mal par les sécessions de la Slovénie et de la Croatie en juin 1991. Il resta néanmoins premier ministre jusqu'en décembre 1991, alors que la guerre avait déjà commencé à ronger une Fédération déliquescente qui se désagrégea au cours des années suivantes.
Près de vingt ans plus tard, malgré les affrontements violents qui les ont opposées les unes aux autres, les anciennes républiques yougoslaves se retrouvent toutes - à des degrés très divers, il est vrai - engagées dans le processus d'intégration européenne. Et la perspective d'un renforcement des liens directs entre les sociétés et les économies de la région n'est plus un tabou. En tout cas, les promoteurs d'un tel rapprochement ne sont plus systématiquement associés à une « yougo-nostalgie » suspecte. Il est clair, en effet, que la Yougoslavie ne ressuscitera plus et que l'avenir de l'ensemble des Balkans occidentaux, malgré les situations de crise qui perdurent encore, se trouve au sein de l'Union européenne. En attendant, une « yougosphère » réunissant les pays de l'ancienne Fédération est peut-être en train de voir le jour, aussi bien dans le domaine économique que culturel.
Reprise du processus d'élargissement : réalité ou illusion ?
Le 25 octobre 2010, les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne ont donné leur feu vert à l'examen de la candidature de la Serbie qui pourrait, désormais, « brûler les étapes » de l'intégration. Deux semaines plus tard, le 8 novembre, l'Union suspendait le régime des visas pour les ressortissants d'Albanie et de Bosnie-Herzégovine. Ceux-ci peuvent donc, à présent, circuler librement dans l'espace Schengen. Les citoyens de Macédoine, du Monténégro et de Serbie bénéficiaient déjà, depuis un an, de cette mesure. Enfin, ce même 8 novembre, l'Union reconnaissait au Monténégro le statut officiel de pays candidat à l'intégration. Milo Djukanovi?, le premier ministre du petit pays, soulignait aussitôt la portée de cette …