Les Grands de ce monde s'expriment dans

CHINE : IN THE MOOD FOR CHANGE

La Cité interdite. La Grande Muraille. Le Palais d'été... Autant de sites symboliques que tout voyageur occidental se doit de visiter lors d'un passage à Pékin. Il est pourtant un lieu inconnu du grand public, où bon nombre de dirigeants occidentaux souhaitent désormais se rendre. Il s'agit d'un bâtiment, datant du XVIIIe siècle, situé dans la banlieue de Pékin, à proximité du Palais d'été, au milieu de la verdure. C'est l'École du comité central du Parti communiste qui, depuis plus d'un demi-siècle, forme l'élite de l'élite. Des milliers de dirigeants y ont effectué un stage, généralement de six mois. Cette sorte de super-ENA est un passage obligé pour les responsables du Parti désireux de grimper dans la hiérarchie. De Mao Zedong à Hu Jintao, ses anciens directeurs ont tous occupé les plus hauts postes à la tête de l'État. Tout ce qui compte et comptera demain à Pékin transite par cette école qui, depuis 2005, s'est ouverte sur l'extérieur. En recevant leaders politiques étrangers et businessmen, le Parti espère mieux cerner les stratégies de ses partenaires tout en faisant passer ses messages. Le premier ministre de Singapour, qui entretient des liens étroits avec la Chine, est un habitué des lieux. Quant à Donald Rumsfeld, Mario Monti, Angela Merkel ou Herman Van Rompuy, ils y ont tous donné des conférences, croisant sans doute à l'occasion Xi Jinping, ex-directeur et nouvel homme fort du pays. Pour comprendre le rôle de cette École centrale, il convient de se replonger dans le passé. Le Parti a toujours été chinois, avant d'être communiste. Son organisation, sa structure, ses rites, ses modes de sélection, sans parler de sa corruption, sont la transposition du système de pouvoir qui a prévalu en Chine pendant des siècles. L'École centrale a pris la succession de l'Académie impériale, qui formait la bureaucratie au service de l'empereur et du peuple. Une bureaucratie que chacun pouvait espérer intégrer, dès lors qu'il le méritait. Ce modèle remonte à 209 avant Jésus-Christ, lorsque Chen Sheng, chef du premier soulèvement paysan, lança ce défi : « Le sang doit-il décider de la destinée des hommes ? Si une personne, à force de travail dépasse les autres en excellence, son origine doit-elle l'empêcher d'accéder au pouvoir et de jouir du prestige qui lui est attaché ? » La révolte porta un fils de paysan sur le trône et créa la dynastie des Han (1). Au fil des siècles, ce système fondé sur la méritocratie va s'affiner sous l'influence de Confucius. L'empereur s'appuie, pour gouverner, sur une technostructure sélectionnée à partir de multiples examens. Une fois nommé, le fonctionnaire et sa famille s'extraient de la masse de la population pour rejoindre la classe dirigeante, avec tous les privilèges qui s'y rattachent. Mais ses prérogatives et sa fortune dépendent de sa compétence et de sa capacité à produire du bien-être pour la population. Qu'il ne gère pas convenablement, et il est exclu du système par l'empereur. Ce dernier, qui détient un pouvoir divin, se doit de favoriser le bonheur …