Les Grands de ce monde s'expriment dans

ISRAEL : LES ARMES DE LA PAIX

Né le 24 juin 1950 dans le faubourg populaire de Kiryat Haïm - près de Haïfa -, Moshé Yaalon, qui a obtenu un master en sciences politiques à l'université de Haïfa, a d'abord été actif dans un mouvement sioniste de gauche (La Jeunesse travailleuse et studieuse), avant d'entrer à 18 ans dans l'armée israélienne au sein de l'unité combattante du Nahal (1). Après ses trois années de service militaire, il s'est installé au kibboutz Grofit dans la plaine de l'Aravah, non loin d'Eilat ; il deviendra plus tard membre du parti de gauche Mapaï. Il participe en première ligne aux combats de la guerre du Kippour d'octobre 1973, avant de servir dans les parachutistes puis dans l'unité des commandos d'élite la plus prestigieuse de Tsahal, la Sayéret Matkal. En 1995, il est nommé chef des renseignements de Tsahal, puis il devient en 1998, en tant que général, le commandant de la Région-Centre, responsable entre autres de la Judée-Samarie - un poste qu'il occupe encore au moment où démarre, en septembre 2000, la seconde Intifada. Il est l'auteur, durant ces années-là, de plusieurs études stratégiques de première importance. Yaalon est ensuite nommé chef d'état-major de Tsahal. Du 9 juillet 2002 au 1er juin 2005, il aura pour tâche d'organiser sur le terrain les ripostes aux attentats meurtriers des terroristes palestiniens au coeur des villes israéliennes. En net désaccord - pour des raisons sécuritaires et géostratégiques - avec le projet de retrait unilatéral de la bande de Gaza prévu pour août 2005 par le gouvernement Sharon, Yaalon quitte l'armée deux mois avant, après que le ministre de la Défense de l'époque, Shaul Mofaz, eut refusé de le reconduire une année supplémentaire dans ses fonctions de chef d'état-major. Il entre alors en politique et est élu à la Knesset, le 10 février 2009, sur la liste du Likoud. Dans le gouvernement de Benyamin Netanyahou, Yaalon décroche le poste de premier vice-premier ministre, ainsi que celui de ministre des Affaires stratégiques. Il est également membre du « cabinet restreint de sécurité ». Président de l'organisme social « Community Services for People with Special Needs » et du Centre de recherches sur l'identité juive et la culture, Moshé Yaalon est bien plus un homme de dossiers et de réflexion qu'un « animal politique » : excellent analyste des menaces extérieures pesant aujourd'hui sur l'État d'Israël et fin stratège, homme discret et jovial au parcours doctrinal très atypique - son maître à penser est plutôt David Ben Gourion que Zeev Jabotinsky -, ce sioniste de toujours, partisan d'une approche libérale en matière socio-économique et religieuse, fait preuve d'une intégrité morale qui pourrait servir de modèle à bien des membres de la classe politique israélienne. R. D. Richard Darmon - La Palestine a été élue « État observateur non membre » de l'ONU le 29 novembre dernier. Quelle est, à vos yeux, la portée de cette décision pour Israël et pour la région ? Moshé Yaalon - L'initiative de l'Autorité palestinienne (AP), qui vient d'être couronnée de succès, constitue une violation flagrante et grossière de tous les accords de paix intérimaires passés depuis 1993 avec Israël - lesquels prohibent toute démarche unilatérale des parties. Le plus inadmissible, c'est qu'une forte majorité des pays membres de l'Assemblée générale de l'ONU s'y sont ralliés, tout comme plusieurs pays européens pourtant cosignataires de nos accords avec l'AP. Cette attitude ne peut que miner la confiance que nous placions dans l'ONU et disqualifier les États européens qui seraient tentés de s'impliquer davantage dans le règlement du conflit avec les Palestiniens. En se tournant vers les Nations unies, Abou Mazen, le président de l'AP, savait qu'il n'avait rien à perdre et tout à gagner. En avalisant cette démarche, qui consiste à contourner la voie de la négociation bilatérale qui prévalait depuis près de vingt ans, l'ONU amorce un virage dangereux. Même s'il est vrai que la reconnaissance formelle de l'État de Palestine ne changera pas grand-chose aux réalités de terrain... Depuis des décennies, on sait bien que l'Assemblée générale des Nations unies fonctionne à coups de majorités automatiques et que, quoi que fasse Israël, il sera toujours condamné. N'est-ce pas Abba Eban qui disait que, si l'on proposait un jour aux membres de l'ONU un projet de résolution affirmant que c'est à cause d'Israël que la terre est plate, 10 % s'y opposeraient et 90 % l'approuveraient ? Tout cela confirme que les Nations unies sont une institution internationale sur laquelle Israël ne saurait se reposer. Face à la décision inacceptable de Mazen, il était tout à fait normal qu'Israël réagisse en défendant pied à pied ses intérêts et en prenant, à son tour, des mesures unilatérales. Il faut que l'AP mesure bien la portée de ses actes. R. D. - La reprise des constructions autour de Jérusalem constitue donc la réponse du berger à la bergère ? M. Y. - Malgré les limites que nous nous étions imposées ces derniers mois afin d'encourager la reprise des pourparlers, nous avons lancé la mise en chantier - tout à fait légale - de 3 200 logements entre Jérusalem et sa grande banlieue est, Maalé Adoumim, ainsi qu'en Judée-Samarie. Des régions qui n'ont jamais constitué dans l'Histoire une quelconque « Palestine »... Apparemment, les Européens n'ont pas bien saisi le profond consensus qui existe en Israël - à la fois au niveau des gouvernements successifs et de la population - sur la poursuite des implantations. Il s'agit d'affirmer la présence israélienne dans l'ensemble de Jérusalem et de sa région, ainsi que dans les zones de Judée-Samarie correspondant aux grands « blocs d'implantations » que notre pays ne pourra que conserver dans le cadre d'un règlement final négocié. S'il est fort regrettable, le tollé diplomatique …