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LES FRERES MUSULMANS EGYPTIENS A L'EPREUVE DU POUVOIR

Les Frères musulmans égyptiens à l'épreuve du pouvoir En juin 2012, un membre de la confrérie des Frères musulmans, Muhammad Morsi, a remporté l'élection présidentielle égyptienne, devenant le premier président islamiste du monde arabe. Il a, depuis, étendu ses prérogatives pour mettre au pas l'ensemble des contre-pouvoirs hérités de l'ère Moubarak. En décembre, il est parvenu à faire accepter par référendum populaire une Constitution sur laquelle les Frères musulmans et leurs alliés salafistes ont imprimé leur marque. Les islamistes occupent donc aujourd'hui, plus que jamais, le centre du jeu politique en Égypte. Comment y sont-ils parvenus ? Que font-ils de leurs nouvelles prérogatives ? Quelles relations entretiennent-ils avec l'armée et avec les révolutionnaires qui ont jeté à bas le régime d'Hosni Moubarak ? Sont-ils susceptibles d'instaurer une vraie démocratie en Égypte ? La conquête du pouvoir Une confrérie d'abord dépassée par la révolution... La remarquable montée en puissance des Frères musulmans dans l'Égypte de l'après-révolution n'a pas manqué de surprendre nombre d'observateurs - et de révolutionnaires. Car si la confrérie, fondée en 1928, représentait bien la principale force d'opposition au président Hosni Moubarak, elle semblait, dans les années précédant le soulèvement, en relative perte de vitesse. Il n'était pas rare d'entendre de jeunes activistes fustiger la passivité des Frères, réduits au statut de faire-valoir du régime Moubarak, pour leur participation à des élections que chacun savait truquées (1). Les années 2006-2010 avaient même été marquées par la dissidence affichée d'un nombre croissant de jeunes militants en rupture de ban avec une confrérie vieillissante (2). Aboutissement logique de cette perte d'attractivité des Frères et de l'échec de leur stratégie légaliste et institutionnelle : des mouvements de jeunesse indépendants sont apparus, bien décidés à mobiliser leurs sympathisants dans la rue et sur Internet. Ce sont ces organisations - en particulier le Mouvement du 6 avril, fondé en 2008, et le groupe « Nous sommes tous Khalid Sa'id », créé en 2010 à la suite de l'assassinat à Alexandrie du jeune Khalid Sa'id par deux policiers - qui appelèrent à manifester contre le régime sur la place Tahrir du Caire le 25 janvier 2011. C'est donc une nouvelle génération politique, étrangère au jeu des partis - Frères compris -, qui fut à l'origine des soulèvements. Prudents, les Frères musulmans attendirent soixante-douze heures avant d'annoncer officiellement leur ralliement au mouvement de contestation. Si la révolution n'avait tenu qu'à eux, elle n'aurait jamais commencé. En revanche, une fois la fronde lancée, ils y participèrent amplement. Que l'on songe à la célèbre bataille de rue entre militants pro-Moubarak et manifestants - un affrontement que la geste révolutionnaire a retenu comme la « bataille des chameaux » pour la raison incongrue que certains partisans du raïs avaient chargé à dos de chameau. On sait aujourd'hui que les Frères - qui étaient, de fait, la faction la mieux organisée de la contestation - y ont joué un rôle décisif, au prix de la vie de plusieurs dizaines de leurs membres. Ce morceau de bravoure révolutionnaire leur servit, par …