Afghanistan : une sortie de guerre aléatoire

n° 140 - Été 2013

La question de la sortie de guerre en Afghanistan est d'une brûlante actualité. Le retrait de la coalition internationale, en effet, est prévu pour 2014 (1). Or, curieusement, depuis 2012 ce dossier a quasiment disparu des écrans. Peut-être, après tout, est-ce parce que la crise afghane est devenue une « patate chaude » dont personne ne veut plus s'occuper.

Cet échec s'explique par de multiples erreurs. On peut tenter d'en dresser un premier bilan. Engluée au « pays de l'insolence » sans avoir emporté de décision politique ou militaire, la coalition sait que pour mettre fin à cette longue guerre (qui a déjà duré plus que celles d'Algérie, du Vietnam ou d'Irak), elle devra trouver une solution diplomatique. En mode majeur, les Américains et leurs alliés sont en quête d'une issue globale qui permettrait de sortir par le haut de la crise afghane en garantissant la sécurité du pays et de la planète face au terrorisme islamique. En mode mineur, dans un contexte de guerre civile renaissante, des discussions avec les taliban (2) ont démarré. La coalition espère que ces négociations permettront d'éviter le pire lors du retrait final (à savoir le retour en force d'Al-Qaïda dans un Afghanistan de nouveau incontrôlable) et prie pour que l'administration mise en place à Kaboul ne fonde pas comme neige au soleil une fois le dernier militaire occidental reparti...

Les erreurs initiales

Entre 2010 et 2013, la guerre est allée crescendo pour un résultat nul ou même négatif si l'on tient compte du terrain regagné par les taliban qui, à la fin de 2012, contrôlaient entièrement 152 des 398 districts afghans. Résultat : d'une « non-victoire annoncée », on est passé à une « guerre inachevée » - pas encore perdue, certes, tant que l'administration Karzaï tient et tant que la coalition évite que les puissances voisines comme le Pakistan, l'Iran, la Chine ou l'Inde s'impliquent dans les affaires intérieures du pays (3).

Le paradoxe légal

Les conditions de l'engagement initial constituent la première erreur. Suite aux attentats du 11 Septembre, les États-Unis déclenchent à partir du 7 octobre 2001 l'opération Enduring Freedom (OEF ou « Liberté immuable »), au nom de l'article 51 de la charte des Nations unies sur la légitime défense. Aucune déclaration de guerre n'est faite à l'Émirat islamique d'Afghanistan, reconnu seulement par une poignée d'États. L'objectif est de détruire les camps d'Al-Qaïda et de balayer le régime des taliban qui les a laissés s'installer. Pour la première fois dans l'Histoire, une grande puissance fait la guerre à un homme, Ben Laden, et à son organisation ! Au nom des principes de la « guerre à la terreur » et de la guerre préventive contre les terroristes, les Américains frappent d'abord seuls, appuyés par des avions de leur allié inconditionnel britannique. Les bombes des B-52 et des B-2, puis les Tomahawk et autres missiles de croisière et missiles « délivrés » par des drones de type Predator s'abattent sur les villes afghanes et les sanctuaires d'Al-Qaïda repérés par satellite. …

Sommaire

Changer le futur

Entretien avec Al Gore par Dan Raviv

Un stratège à la manœuvre

Entretien avec Stanley McChrystal par Brigitte Adès

Afghanistan : une sortie de guerre aléatoire

par Jean-Charles Jauffret

Le monde vu des coulisses

Entretien avec Claude Guéant par Alexandre Del Valle et Patrick Wajsman

Dubaï face aux printemps arabes

Entretien avec Dahi Khalfan Tamim par Loulouwa Al Rachid

Le verrou jordanien

par Laurent Zecchini

Minorités syriennes : entre le marteau et l'enclume

par Christophe Chiclet

Algérie : l'après-Bouteflika a commencé

par Luis Martinez

Maroc : les paris du roi

par Pierre Vermeren

FIN DE PARTIE POUR LES TRAVAILLISTES AUSTRALIENS ?

par Xavier Pons

COREE DU SUD : UNE FEMME AUX COMMANDES

Entretien avec Park Geun-Hye par Pascal Dayez-Burgeon

DEDIABOLISER LA COREE DU NORD ?

par Pascal Dayez-Burgeon

EUROPE : L'ELARGISSEMENT, JUSQU'OU ?

par Yves Gounin

Le 28e membre du club

par Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin

CROATIE : LA PROMESSE EUROPEENNE

Entretien avec Ivo Josipovic par Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin

PAYS-BAS : LE RETOUR AU CONSENSUS ?

par Jean-Pierre Stroobants

ROUMANIE : SORTIR DU POST-COMMUNISME

Entretien avec Traian Basescu par Marc Semo

GEORGIE : LA FIN D'UNE EPOQUE ?

Entretien avec Bidzina Ivanichvili par Régis Genté

PERILS SUR L'INGOUCHIE

Entretien avec Iounous-Bek Evkourov par Galia Ackerman et Rosa Malsagova

Convoitises arctiques

par Caroline Morange

Groenland : l'Eldorado du Grand Nord

Entretien avec Aleqa Hammond par Alexis Rosenzweig