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FIN DE PARTIE POUR LES TRAVAILLISTES AUSTRALIENS ?

Au moment où nous mettons sous presse, nous apprenons la démission forcée de Julia Gillard de son poste de premier ministre et son remplacement par Kevin Rudd, élu à la tête du Parti travailliste. Ce développement imprévu n'altère en rien la logique de cet article dont les principales analyses restent valables et éclairantes. Le 30 janvier 2013, le premier ministre australien, la Travailliste Julia Gillard, faisait savoir que les prochaines élections législatives auraient lieu le 14 septembre. Cette communication suscita la perplexité des commentateurs : pourquoi, au rebours de la pratique habituelle, survenait-elle si longtemps à l'avance, privant les Travaillistes de l'avantage d'une annonce tardive, susceptible de prendre l'opposition au dépourvu (1) ? S'agissait-il d'un astucieux coup de poker ou d'une bévue de plus de la part d'un gouvernement aux abois ? Depuis trois ans, en effet, le gouvernement Gillard avance sur la corde raide, dépourvu de majorité au Parlement, réduit à compter sur les voix de quelques députés indépendants pour se maintenir au pouvoir et sur celles des sénateurs Verts pour faire adopter ses projets de loi (2). Quant à la cote de popularité du premier ministre, elle demeure très faible - Tony Abbott, son adversaire conservateur, la devance de 8 points et le pourcentage d'opinions négatives à son égard dépasse de 22 points celui des opinions positives. Tous les sondages prédisent à Mme Gillard, ainsi qu'au Parti travailliste australien (ALP), une cuisante défaite électorale (3). Comment les Travaillistes ont-ils réussi à s'aliéner le soutien de la population alors que le pays vit dans la tranquillité et que son économie reste florissante, avec des taux de chômage (4) et de croissance (5) qu'envieraient bien d'autres États développés ? En un sens, Julia Gillard paie le prix de la manoeuvre cynique et brutale qui l'a portée au pouvoir en juin 2010 lorsque, vice-premier ministre de Kevin Rudd, elle a inopinément déposé celui-ci et pris sa place (6). Elle y a non seulement gagné une réputation de traîtrise dont elle n'a pas réussi à se défaire mais elle a, aussi, provoqué le ressentiment de Rudd et de ses soutiens qui n'ont dès lors cessé de manoeuvrer pour la déstabiliser. Gillard a dû faire face à deux tentatives de contre-putsch et à de nombreuses fuites destinées à l'embarrasser. Ces manoeuvres ne reposaient pas uniquement sur le désir de revanche de Kevin Rudd. Elles se nourrissaient également des sondages qui, de façon régulière, indiquaient que seul Rudd, dont la popularité se maintenait à un niveau élevé, serait en mesure de tenir tête à l'opposition conservatrice emmenée par Tony Abbott, et d'éviter ainsi un « carnage » parmi les députés travaillistes. Pour nombre de ces derniers, y compris des adversaires de Rudd comme le trésorier du parti, Wayne Swan, le dilemme était soit de continuer à soutenir Gillard, quitte à perdre certainement leur siège, soit de se rallier à Rudd et de se ménager ainsi une perspective de victoire. On comprend le trouble qui s'est emparé de certains d'entre eux... Des Travaillistes en perdition …