Les Grands de ce monde s'expriment dans

Maroc-Europe : un partenariat privilégié


Michel Barnier - Les quinze premières années du règne de Mohammed VI ont été marquées par de grands chantiers institutionnels et une modernisation accélérée du pays dans toute une série de domaines.
En matière politique, avec l'adoption d'une nouvelle Constitution en juillet 2011 qui affirme ou réaffirme un certain nombre de principes démocratiques (séparation des pouvoirs, indépendance de la justice, égalité homme-femme, liberté d'opinion et d'expression, etc.). Fait unique dans le monde arabe : ce texte reconnaît l'apport du judaïsme dans l'identité marocaine.
Sur le terrain économique, avec l'insertion de l'économie marocaine dans la mondialisation. De nombreux accords de libre-échange ont été conclus, notamment avec les États-Unis, la Turquie, etc., sans oublier l'accord d'association avec l'UE. Pour accompagner le développement de son économie, le royaume s'est également lancé dans de grands projets d'infrastructures et d'aménagement du territoire (port Tanger Med, TGV entre Tanger et Casablanca...).
Sur le plan social, avec la mise en oeuvre de politiques publiques de développement et de lutte contre la pauvreté. Je citerai, entre autres programmes emblématiques, l'Initiative nationale de développement humain et le RAMED (Régime d'assistance médicale) qui a permis aux populations les plus défavorisées d'accéder aux soins de santé.
Sur la scène internationale, enfin, la voix du Maroc porte de plus en plus loin. Le pays s'est récemment fait remarquer pour son dynamisme au sein du Conseil de sécurité de l'ONU en tant que membre non permanent (2012-2013) et a été en première ligne dans l'opposition au régime de Bachar el-Assad.
F. E. - Le Maroc a échappé aux soubresauts du printemps arabe. Quels sont les facteurs qui permettent d'expliquer cette singularité ?
M. B. - Le Maroc a certes été épargné par les printemps arabes, mais il n'y est pas resté indifférent. Si le pays s'est doté d'une nouvelle Constitution à l'été 2011, c'est bien parce que ses dirigeants avaient pris conscience de la nécessité d'accélérer les réformes face à des opinions publiques qui réclamaient - et continuent de réclamer - une plus grande participation à la décision politique. Cela étant dit, le royaume n'a pas attendu les événements de 2011 pour se lancer dans un vaste mouvement de réformes. Ces réformes, initiées par le roi dès son avènement en 1999, ont eu le temps de produire des effets durant les années 2000. Les citoyens marocains ont constaté des changements concrets : une amélioration de leurs conditions de vie, mais aussi une nette avancée sur le plan des libertés individuelles. Ce sont ces progrès, associés à la volonté du roi d'accélérer la cadence en 2011, qui ont convaincu l'opinion publique de lui accorder sa confiance et de continuer dans cette voie.
F. E. - Le fait que le Maroc ait préféré les F15 américains au Rafale français (1) traduit-il, selon vous, un déclin des relations Paris-Rabat ?
M. B. - Ce n'est pas ce que j'observe, y compris dans le secteur de l'industrie de défense. La preuve : DCNS vient de livrer au Maroc une frégate multi-mission. Globalement, la France demeure le premier …