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Quand la Chine de l'énergie s'éveillera...

Politique Internationale - Comment la Chine est-elle devenue un pays aussi crucial pour le paysage énergétique mondial ? Hervé Machenaud - L'évolution du secteur énergétique en Chine est indissociable des mutations économiques du pays. L'Histoire nous offre à bien des égards des enseignements. Souvenons-nous qu'en 1850 la Chine représente un tiers du produit intérieur brut mondial. Son poids ne date pas d'hier. Certes, le pays tarde à plonger dans la révolution industrielle et le fait qu'il subisse peu à peu l'emprise de la colonisation limite son influence. On peut même dire qu'entre 1850 et 1950 une série de désordres intérieurs et extérieurs retardent considérablement son éclosion. Mais les ferments de sa future accélération sont là. En toile de fond - et c'est important dans la perspective du développement énergétique - il y a cette dualité à laquelle la Chine est confrontée depuis des siècles : l'unité et l'ouverture. La vision non seulement de la Chine contemporaine, mais aussi des empires millénaires gagne souvent à être étudiée à travers ce prisme de l'isolement ou de l'ouverture sur le monde. P. I. - La notion d'ouverture est de plus en plus indissociable des analyses énergétiques, ne serait-ce que parce que la sécurité d'approvisionnement oblige la plupart des pays à se tourner vers l'extérieur. À partir de quel moment la Chine rompt-elle définitivement son isolement ? H. M. - La période de Mao peut être considérée comme un temps de repli. A contrario, au début des années 1980, quand Deng Xiaoping consolide peu à peu son pouvoir, l'heure est à l'ouverture. Il entame alors un virage radical pour son pays, avec la volonté non seulement de dialogue à l'échelle internationale mais aussi de partenariats opérationnels. Ce changement de politique que Deng met en branle ne doit pas être considéré comme une orientation théorique. On se méprend souvent quand on considère la Chine comme le jouet de la planification, avec la volonté de programmer très en amont de grands objectifs. P. I. - Dans le secteur de l'énergie, quelles sont les dernières initiatives majeures de la planification à la chinoise ? H. M. - En réalité, la planification chinoise vise beaucoup moins à assigner des buts précis qu'à tracer une voie, c'est-à-dire la direction dans laquelle le pays doit aller. Les dirigeants chinois sont beaucoup plus pragmatiques qu'on le croit généralement : avant par exemple de définir une réglementation il est d'usage de vérifier si le futur système résiste à l'épreuve des faits. Ainsi, la grande loi sur l'énergie adoptée en 2004 a été mise sur les rails dès 2002. Quand la Chine pense qu'une transformation est nécessaire, elle va d'abord tester le procédé, puis l'afficher de manière officieuse et enfin, quand il a prouvé son efficacité, il sera définitivement validé par un texte réglementaire. La Chine est le pays du pragmatisme et de la réglementation a posteriori. P. I. - Les hommes d'affaires occidentaux disent souvent qu'en Chine la négociation procède d'une démarche quasi philosophique... H. M. - Le précepte d'origine taoïste du …