Politique Internationale - E.ON, l'un des géants européens de l'énergie et numéro un allemand de l'électricité, ne cache pas son ambition de développer son activité dans l'Hexagone. Aujourd'hui, la France et l'Allemagne jettent chacune les bases d'une transition énergétique. Peut-on dire, à la lumière de leurs objectifs et des moyens mis en oeuvre pour y parvenir - très différents -, que les deux pays sont antagonistes ?
Luc Poyer - On peut, bien sûr, s'attarder sur les nombreux points de divergence entre les politiques énergétiques française et allemande. Mais il y a aussi des terrains de rapprochement notables, à commencer par la volonté affichée par les deux États de modifier des éléments majeurs du paysage. Commençons par le concept : l'Energiewende, le « tournant énergétique » voulu par Berlin, partage avec le Grenelle de l'environnement naguère - et avec l'actuelle « stratégie nationale de la transition énergétique » en préparation en France - une même volonté politique de peser sur les grands choix industriels et environnementaux. Il est vrai que l'Allemagne se montre plus ambitieuse : elle prévoit que les énergies renouvelables représenteront au moins 35 % de sa consommation brute d'électricité d'ici à 2020, et plus de 80 % à l'horizon 2050, contre 30 à 40 % pour la France en 2030. Parallèlement, l'Allemagne envisage de réduire de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, et d'au moins 80 % en 2050, alors que la France parle de diviser les siennes par quatre. Toutefois, les objectifs des uns et des autres doivent être examinés à l'aune des spécificités de chaque pays. La France, qui produit plus de 75 % d'électricité d'origine nucléaire, dispose d'un « mix » énergétique unique au monde ; l'Allemagne, elle, mise davantage sur la complémentarité des sources de production.
P. I. - Cette répartition très différente du « mix » énergétique empêche-t-elle les coopérations industrielles ?
L. P. - On en vient aux fameux points de convergence entre les deux pays, qui concernent directement leurs compétences industrielles. Le choix de mix énergétiques différents ne signifie pas que les entreprises françaises en Allemagne et les entreprises allemandes en France ne puissent pas participer à la réussite de la transition énergétique chez leur voisin. Si l'on prend le cas d'E.ON, voilà un acteur qui par ses investissements en France - plus de 2 milliards d'euros depuis 2008 - contribue à réduire l'empreinte carbone du parc thermique français. Des unités de production au charbon sont remplacées par de nouvelles centrales fonctionnant au gaz naturel et, demain, à la biomasse. Cette expérience a été acquise notamment en Suède et au Royaume-Uni sur des installations de taille et de technologie comparables. En matière d'innovation, des projets de recherche et développement plus nombreux pourraient sans doute être menés en commun dans un cadre franco-allemand. Le stockage de l'énergie, en particulier, est un domaine qui mobilise de nombreux opérateurs et qui pourrait faire l'objet de coopérations renforcées.
On se rend bien compte, des deux côtés du …
Luc Poyer - On peut, bien sûr, s'attarder sur les nombreux points de divergence entre les politiques énergétiques française et allemande. Mais il y a aussi des terrains de rapprochement notables, à commencer par la volonté affichée par les deux États de modifier des éléments majeurs du paysage. Commençons par le concept : l'Energiewende, le « tournant énergétique » voulu par Berlin, partage avec le Grenelle de l'environnement naguère - et avec l'actuelle « stratégie nationale de la transition énergétique » en préparation en France - une même volonté politique de peser sur les grands choix industriels et environnementaux. Il est vrai que l'Allemagne se montre plus ambitieuse : elle prévoit que les énergies renouvelables représenteront au moins 35 % de sa consommation brute d'électricité d'ici à 2020, et plus de 80 % à l'horizon 2050, contre 30 à 40 % pour la France en 2030. Parallèlement, l'Allemagne envisage de réduire de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, et d'au moins 80 % en 2050, alors que la France parle de diviser les siennes par quatre. Toutefois, les objectifs des uns et des autres doivent être examinés à l'aune des spécificités de chaque pays. La France, qui produit plus de 75 % d'électricité d'origine nucléaire, dispose d'un « mix » énergétique unique au monde ; l'Allemagne, elle, mise davantage sur la complémentarité des sources de production.
P. I. - Cette répartition très différente du « mix » énergétique empêche-t-elle les coopérations industrielles ?
L. P. - On en vient aux fameux points de convergence entre les deux pays, qui concernent directement leurs compétences industrielles. Le choix de mix énergétiques différents ne signifie pas que les entreprises françaises en Allemagne et les entreprises allemandes en France ne puissent pas participer à la réussite de la transition énergétique chez leur voisin. Si l'on prend le cas d'E.ON, voilà un acteur qui par ses investissements en France - plus de 2 milliards d'euros depuis 2008 - contribue à réduire l'empreinte carbone du parc thermique français. Des unités de production au charbon sont remplacées par de nouvelles centrales fonctionnant au gaz naturel et, demain, à la biomasse. Cette expérience a été acquise notamment en Suède et au Royaume-Uni sur des installations de taille et de technologie comparables. En matière d'innovation, des projets de recherche et développement plus nombreux pourraient sans doute être menés en commun dans un cadre franco-allemand. Le stockage de l'énergie, en particulier, est un domaine qui mobilise de nombreux opérateurs et qui pourrait faire l'objet de coopérations renforcées.
On se rend bien compte, des deux côtés du …
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