C'est l'histoire d'une « perturbation » dont le monde entier parle avec fièvre et affolement mais dont nul ne semble tout à fait en mesure de donner une évaluation politique satisfaisante. Deux ans après avoir fondu sur Washington pour conquérir la présidence à la barbe de toute la classe politique, la « tempête Trump » continue de mettre tout sens dessus dessous sur la scène américaine, mais aussi à travers la planète. De la même manière qu'il avait jeté aux orties le « vade-mecum » des campagnes présidentielles pour gagner l'élection, le nouveau président s'est affranchi des us et coutumes qui guident traditionnellement la politique étrangère des États-Unis, plongeant l'Amérique et le monde dans le brouillard de la surprise et de l'incertitude à coups de tweets et de décisions iconoclastes. En quelques mois d'actions spectaculaires - la sortie du Traité transpacifique et de l'accord de Paris sur le climat, le déménagement de l'ambassade américaine à Jérusalem, la dénonciation de l'accord nucléaire iranien, la politique de tension sur le commerce avec l'Europe et la Chine, l'ébranlement de l'Otan puis l'ouverture à Poutine et à Kim Jong-un -, le locataire de la Maison-Blanche a tracé son chemin à grands coups de serpe, prêt à défier ses alliés et à tester ses rivaux, dans l'objectif de redonner une marge de manoeuvre à « l'Amérique d'abord ». Conséquence : le monde entier a la tête qui tourne face à cette politique étrangère d'un nouveau type. « On n'a jamais rien vu de pareil », nous confiait en juin le professeur Graham Allison, directeur de la Kennedy School de Harvard, exprimant la stupéfaction des observateurs et notant leur incapacité à embrasser le phénomène. Sur un terrain international en plein tumulte, dans un monde qui n'avait pourtant pas attendu Trump pour s'embraser et se défaire, cette diplomatie du chaos est devenue le point de fixation de tous les regards et de toutes les inquiétudes.
C'est une préoccupation compréhensible, vu l'importance du facteur américain pour la stabilité du monde. Mais est-ce à dire que le président américain serait devenu LE grand perturbateur du jeu mondial, la principale cause de l'instabilité, comme l'affirment hâtivement ses adversaires et même certains de ses plus proches collaborateurs par tribune anonyme dans le New York Times (1), avides de faire sortir du jeu cet « électron fou » pour que tout rentre dans l'« ordre » ? Trump est-il vraiment en train de détruire la stabilité du monde post-1945 et la crédibilité du leadership américain ? Sommes-nous entrés, avec lui, dans une nouvelle ère où les alliances, les valeurs, la parole donnée et « jusqu'à l'idée même de diplomatie » sont menacées comme le suggérait le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian dans son récent discours devant la conférence des ambassadeurs ? Ou cette critique en règle est-elle exagérée ? Avec son instinct aigu du rapport de force, Trump n'est-il pas, plutôt, en train de tenter d'adapter son pays au nouveau monde multipolaire brutal qui a émergé derrière la façade …
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