Le 9 septembre 2018, les Démocrates de Suède (SD) ont réalisé le meilleur résultat électoral jamais enregistré par un parti d'extrême droite à l'échelle du royaume. Cette date restera dans les annales, tant elle symbolise l'incapacité des partis politiques traditionnels suédois à contenir un courant politique qui, il est vrai, a le vent en poupe aux quatre coins du continent. Avec 17,5 % des suffrages exprimés, les SD se hissent dans le peloton de tête de l'extrême droite européenne. Et grâce au scrutin proportionnel, ils obtiennent 62 députés (sur un total de 349) au Riksdag - le Parlement monocaméral, élément central dans cette démocratie parlementaire où le roi n'a quasiment pas de pouvoirs. Seules les deux pièces centrales de l'échiquier politique suédois font mieux : le Parti social-démocrate du premier ministre sortant, Stefan Löfven (28,2 % des voix, 100 députés) et le Parti conservateur, à la barre de 2006 à 2014 (19,8 %, 70 députés). Le résultat obtenu par une formation ayant poussé dans un terreau néonazi est d'autant plus remarquable que, ce jour de septembre 2018, seulement 13 % du corps électoral s'est abstenu. Le parti de Jimmie Åkesson, son chef de 39 ans, espérait mieux encore, à la faveur notamment de sondages récents qui, en moyenne, lui avaient accordé environ 20 % des suffrages, synonymes d'une probable deuxième place. Néanmoins, la formation d'extrême droite ne cesse de monter. En douze ans, elle a multiplié son score par six. Et elle a connu la plus forte progression du scrutin 2018, améliorant ainsi de 4,6 points son précédent score record : 12,9 % aux législatives de 2014.
À l'époque, les autres partis, pris de court, avaient bâti à la va-vite un front anti-SD visant à le maintenir dans l'isolement le plus total à l'échelle nationale. Cette initiative avait mal résisté au temps. Quatre ans plus tard, la donne a changé. Il sera quasiment impossible d'ignorer un rival ayant récolté plus d'un sixième des bulletins de vote et qui, pour les quatre ans à venir, alignera 18 % des députés. L'Europe entière se pose désormais de nombreuses questions : que sont exactement les SD ? Quels sont les fondements idéologiques de cette formation ? Quel est le parcours de son chef ? Comment expliquer l'envolée de sa popularité dans un pays de dix millions d'habitants où les extrêmes ont longtemps été maintenus à la marge ?
D'où viennent les Démocrates de Suède ?
Créé il y a trente ans, en 1988, ce parti est longtemps resté confidentiel, même s'il s'est rapidement imposé au sein de la nébuleuse d'extrême droite suédoise. Celle-ci est alors composée de divers groupuscules formés ici et là dans le royaume, qui n'a jamais cessé d'en produire depuis les années 1930 (1). Mais jusqu'à l'apparition des SD, des querelles de personnes, des condamnations d'activistes pour meurtres et autres violences, une méfiance générale à leur encontre, une idéologie sulfureuse émanant du nazisme et une pénurie de moyens intellectuels et/ou financiers ont empêché l'émergence d'une formation susceptible de s'installer durablement …
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