Le réalisateur et cinéaste ukrainien Oleg Sentsov est né le 13 juillet 1976 à Simferopol, en Crimée. Connu pour son unique long-métrage, Gamer, réalisé en 2011 et sélectionné par plusieurs festivals de renom comme celui de Rotterdam, il s’engage à l’hiver 2013 dans le mouvement de protestation Euro Maïdan à Kiev qui aboutira à la fuite du président Viktor Ianoukovitch et à la victoire de la « Révolution de la dignité ». Peu après, la Crimée est « réintégrée » par Vladimir Poutine au sein de la Russie. Oleg Sentsov, qui vit dans la péninsule, dénonce avec véhémence cette annexion. Le 11 mai 2014, en compagnie de trois supposés « complices », il est arrêté par le FSB russe pour « préparation d’attentats ». Au cours de la procédure, en juillet 2015, l’un de ses co-accusés, qui l’avait précédemment incriminé, se rétracte et affirme que ses aveux lui ont été arrachés sous la torture. Malgré cette déclaration et malgré l’extrême faiblesse du dossier de l’accusation, le cinéaste est condamné à vingt ans de réclusion à l’issue de ce procès qu’Amnesty International qualifiera de « stalinien ».
Emprisonné dans une colonie pénitentiaire en Sibérie occidentale, il entame en 2018 une grève de la faim qui durera 145 jours. Son combat fait le tour du monde. Sur tous les continents, des cinéastes, des intellectuels et des dirigeants politiques se mobilisent pour le défendre. En octobre 2018, il reçoit le prix Sakharov du Parlement européen. Alors que son état de santé se dégrade, il est hospitalisé et contraint d’arrêter sa grève de la faim, après avoir été alimenté de force.
En novembre 2018, l’Assemblée générale des Nations unies adopte une résolution appelant à sa libération, tandis que des réalisateurs du monde entier exigent qu’il soit mis fin à son calvaire. Oleg Sentsov est devenu un symbole... et un détenu encombrant pour la réputation de Vladimir Poutine.
En juillet 2019, le nouveau président ukrainien, Volodymyr Zelensky, propose à son homologue russe un échange de prisonniers. Celui-ci aura lieu le 7 septembre 2019 : 35 Ukrainiens, dont Oleg Sentsov, sont échangés contre 35 Russes qui se trouvaient jusqu’alors aux mains de Kiev. Aujourd’hui, le réalisateur veut reprendre le tournage de ses films, à commencer par Rhino, qu’il avait dû interrompre fin 2013 au moment du Maïdan. Mais l’expérience de la prison l’a profondément marqué : il est plus que jamais convaincu de la nécessité d’alerter le monde entier sur la politique expansionniste de la Russie dans son étranger proche.
I. L.
Isabelle Lasserre — La prison a-t-elle changé quelque chose en vous ?
Oleg Sentsov — Non. Je n’ai pas changé. Ceux qui ne m’ont pas vu pendant cinq ans me l’ont confirmé. J’ai sans doute évolué, comme toute personne évolue forcément en cinq ans et comme j’aurais de toute façon évolué si j’avais été en liberté. La vie est ainsi faite. J’ai toujours travaillé sur moi-même, cherché à me perfectionner et à gagner en maturité, en particulier au niveau spirituel. Je m’y suis astreint …
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