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Une solution islamique pour le Mali ?

Depuis 2019, la multiplication des attaques de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) contre l’armée française et les troupes de la coalition du G5 Sahel (le Groupe des cinq, qui comprend le Mali, la Mauritanie, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad) a montré à quel point la situation restait fragile dans la zone. Autrefois concentré dans le nord du Mali, qui représente les deux tiers du territoire national mais moins de 10 % de la population du pays, le conflit se focalise désormais sur le Liptako-Gourma, région dite des « trois frontières » car elle chevauche le Mali, le Burkina Faso et le Niger.

La France est directement concernée. En janvier 2013, elle a lancé au Mali sa plus importante intervention militaire depuis la guerre d’Algérie. Un an plus tard, l’opération « Serval », rebaptisée « Barkhane », s’est étendue à l’ensemble des pays du G5 Sahel. Les divers mouvements insurrectionnels de la zone n’en ont pas moins continué de se développer, notamment au Mali en dépit de l’arrivée de Casques bleus onusiens, d’une implication plus marquée de l’Union européenne et de la signature en juin 2015 à Alger d’un accord de paix qui n’a pas été mis en œuvre par Bamako.

À l’heure où le président Ibrahim Boubacar Keïta, réélu en août 2018 et familièrement appelé « IBK », a officiellement appelé à négocier avec les insurgés qualifiés de « terroristes », la dégradation de la situation a ainsi mis en évidence les impasses de la réponse militaire aux nombreux conflits de la région (1).

 

Les milices d’autodéfense, en particulier, se sont multipliées pour pallier les déficiences des armées nationales, tandis qu’émergeaient et se renforçaient de nouveaux groupes djihadistes comme la katiba du Macina dans le centre du Mali ou Ansarul Islam dans le nord du Burkina Faso (2). Quant à l’accord de paix d’Alger, il semble désormais caduc. En effet, il s’est focalisé sur les mouvements séparatistes touaregs et a délibérément laissé de côté les groupes djihadistes qui constituaient pourtant la principale menace contre l’intégrité territoriale du Mali. Certains estiment même que, par contrecoup, il n’a pas été pour rien dans l’embrasement de la région centrale du Macina, dont les combattants avaient été exclus des programmes de démobilisation prévus en 2015 en faveur des insurgés du Nord.

 

Indéniablement, le Mali constitue le maillon faible des pays du G5 Sahel. À Bamako, la classe politique est discréditée et divisée. Délégitimé par de nombreux scandales de corruption, le gouvernement du président Ibrahim Boubacar Keïta semble dépassé par un conflit sans fin qui oppose des dizaines de milliers de militaires et de Casques bleus à une poignée de combattants déterminés. Dans un pays très majoritairement musulman, l’ambiance est délétère et le désarroi gagne toutes les strates de la population. À tel point que certains se demandent si, en dernier ressort, une islamisation de la gouvernance ne constituerait pas une solution pour sortir le Mali de la crise politique et morale dans laquelle il s’enfonce.

Les regards se …