Dans tous les pays frappés par le SARS-CoV-2, l’épidémie a servi de révélateur et mis en lumière certains aspects particuliers de la situation politique, économique ou sociale. En Chine, l’origine sanitaire des crises des coronavirus de 2003 et de 2019, et la manière dont elles ont été gérées sur le plan aussi bien politique que médical présentent de nombreuses similitudes. Mais, alors que le système d’alerte contre les épidémies mis en place au lendemain du SRAS a montré ses limites, le programme stratégique dit « made in China 2025 » lancé par le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information en 2015 a fait, lui, la preuve de son efficacité en permettant aux géants de la tech chinoise d’innover face au Covid-19. Certaines solutions « intelligentes » mises au point ou améliorées lors du confinement et du déconfinement de la population de Wuhan sont appelées à rejoindre l’arsenal des dispositifs de contrôle des futurs habitants des « safe cities » (villes sécurisées). Cette pandémie accélère ainsi l’avènement d’une société chinoise 4.0 en proie au danger d’un totalitarisme renouvelé : une « dictature numérique » ou « digitature ».
Les exemples abondent. Les robots qui désinfectent les couloirs des centres hospitaliers peuvent aussi être programmés pour devenir des auxiliaires de la Sécurité publique. Les drones qui survolent la ville pour vérifier que vous respectez les « gestes barrières » seront un jour l’œil intrusif permanent du pouvoir dans la vie de chaque citoyen, chez lui comme à l’extérieur. Quel est le « rêve chinois » de Xi Jinping ? En généralisant le « crédit social » à compter du 1er janvier 2020, il pose la clé de voûte d’un ensemble de systèmes qui épient aussi bien les individus que les entreprises, qui les notent en temps réel, pour les sanctionner ou les récompenser selon des règles définies au sein de l’État-parti.
D’une épidémie l’autre
Les premiers cas de SRAS ou de Covid-19, en 2002 comme en 2019, ont été, à quelques jours près, découverts à la mi-novembre. Les deux épidémies semblent trouver leur origine dans la consommation d’animaux sauvages achetés vivants dans des marchés aux poissons : une civette à Foshan, dans la province méridionale du Guangdong ; un pangolin à Wuhan, dans la province centrale du Hubei. D’autres pistes, explorées dès le mois de janvier 2020, mènent à un laboratoire P2 ou à un laboratoire P4 de Wuhan (ce dernier étant né d’une collaboration franco-chinoise) où un laborantin aurait pu commettre une erreur de manipulation… La plupart des chercheurs à travers le monde penchent pour la première hypothèse et pointent du doigt le goût des Chinois pour les mets prisés et coûteux (1). En dix-sept ans, le trafic international d’animaux protégés, parfois en voie de disparition, s’est intensifié entre certains pays d’Afrique et d’Asie et la Chine, qui bafoue ouvertement la Convention internationale contre le trafic des espèces sauvages (CITES) dont elle est pourtant signataire depuis un quart de siècle (2). Dans les deux cas, les autorités chinoises ont réagi en instaurant un contrôle et une censure vigilante de l’information dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ceux qui ont tenté d’alerter le grand public et la communauté internationale, …
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