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Taïwan survivra-t-elle à la menace chinoise ?

Après la fin brutale de la parenthèse libérale à Hong Kong, le président chinois Xi Jinping ne fait pas mystère de son ambition d’en finir avec le « problème taïwanais ». Quelle que soit la teneur de cette menace et malgré la montée en gamme de l’armée chinoise, Taïwan est en mesure d’y résister, à certaines conditions. La majorité des Taïwanais sont, en effet, prêts à se battre en cas d’agression de la Chine. Quant aux capacités dont ils ont besoin pour y faire face, elles dépendent de plusieurs variables, à commencer par l’attitude des États-Unis.

Compte tenu de sa position centrale sur l’axe indo-pacifique, Taïwan peut compter sur le soutien des Américains et de ses alliés, dont le Japon. Ce soutien est d’autant plus fort que l’industrie taïwanaise des semi-conducteurs s’est rendue incontournable sur la scène mondiale. Enfin, comme elle l’a montré depuis le début de la pandémie de Covid-19, Taïwan sait anticiper les mauvais coups venant du continent, ce qui lui a permis d’amplifier la bonne performance de son économie et lui donne les moyens financiers de renforcer ses capacités militaires pour, le cas échéant, livrer une guerre asymétrique à la Chine.

Une pression croissante

Depuis la fondation de la République populaire par Mao Tsé-toung et le repli stratégique de son adversaire Tchang Kaï-chek sur Taïwan pour y transplanter la république de Chine, le Parti communiste chinois cherche à prendre le contrôle de l’île. En 1951, une tentative d’invasion générale par l’Armée de libération populaire (APL) s’est soldée par un échec. Il en fut de même de son offensive surprise contre Kinmen en août 1958, avant que la révolution culturelle ne mette un coup d’arrêt à ces assauts (1). Pendant des décennies les lignes n’ont pas bougé. Mais aujourd’hui, la dérive autocratique du pouvoir chinois aux mains de Xi Jinping et la nouvelle guerre froide sino-américaine ravivent la tension autour de Taïwan. Malgré l’échec de sa diplomatie du « loup combattant » de plus en plus mal tolérée y compris par les Européens (2), Pékin n’hésite plus à recourir à son outil militaire, comme en témoignent les affrontements à la frontière avec l’Inde ou les démonstrations de force en mer de Chine et autour de Taïwan. Selon certains experts, une attaque armée pourrait intervenir d’ici à 2027, avant le quatrième mandat de Xi Jinping et le centième anniversaire de l’Armée populaire de libération (3).

Depuis la première élection en 2016 de Tsai Ing-wen, l’actuelle présidente issue des rangs du Parti démocrate progressiste (DPP), la Chine a adopté une position de plus en plus agressive envers Taïwan, par toutes les voies possibles : en lui ravissant des alliés diplomatiques officiels parmi le peu qui lui restent ; en exerçant toutes sortes de pressions psychologiques ou de chantages économiques (par exemple en faisant miroiter des achats de fruits et légumes pour favoriser la victoire du candidat du Kuomintang lors des élections locales de 2018) ; et, enfin, en renforçant sa présence militaire aérienne et navale à proximité de Taïwan.

La réélection de Tsai en janvier 2020 et la pandémie du Covid-19 ont envenimé …