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Olaf Scholz dans les traces d'Angela Merkel

Tous les règnes ont une fin, même celui d’Angela Merkel. Après quatre mandats, celle que la presse allemande appelait déjà depuis des années « la chancelière éternelle » a tiré sa révérence le 8 décembre 2021, après 5 860 jours à la tête du gouvernement : presque autant, à neuf jours près, que son mentor Helmut Kohl (1982-1998).

Le départ d’Angela Merkel sonne-t-il pour autant la fin du « merkélisme » ? La question se pose pour deux raisons. La première tient à son successeur, le social-démocrate Olaf Scholz (SPD), qui a fait campagne en se posant comme son héritier alors qu’ils n’appartiennent pas au même parti. La seconde est liée à la nouvelle coalition au pouvoir : certes, elle est différente de la précédente puisque la famille politique de l’ex-chancelière (CDU-CSU) est passée de la majorité à l’opposition et que deux formations (les Verts et les libéraux du FDP) ont fait le chemin inverse.

Il n’empêche : entre la « grande coalition » d’Angela Merkel (CDU-CSU/SPD) et la « coalition feu tricolore » d’Olaf Scholz (SPD/Verts/FDP), les marqueurs de continuité sont évidents, à la fois parce que les sociaux-démocrates sont restés au gouvernement, parce que celui qui a succédé à la chancelière n’était autre que son vice-chancelier, et enfin parce que l’accord programmatique qu’ont signé Olaf Scholz et ses partenaires ne prévoit pas de rupture profonde avec la politique conduite par Angela Merkel pendant ses seize années à la tête de l’Allemagne.

Olaf Scholz, l’homme qui voulait être « chancelière »

Fin août 2021, un mois avant les élections législatives allemandes, paraissait dans le bimestriel féminin Emma une publicité du SPD qui reprenait l’affiche de campagne d’Olaf Scholz mais barrée d’un slogan inédit : « Il peut être chancelière. » Quelques jours plus tôt, le magazine de la Süddeutsche Zeitung publiait une photo du candidat social-démocrate dessinant avec ses mains un losange, clin d’œil appuyé au geste iconique d’Angela Merkel. À ses adversaires qui l’accusèrent d’usurpation, l’intéressé fit cette réponse : « Ce n’est pas mal, pour un homme, d’être comparé à une chancelière qui a réussi. »

Ces deux images ne sont pas seulement des « coups de com ». Elles sont aussi la traduction visuelle d’une intuition stratégique posée dès la déclaration de candidature d’Olaf Scholz à l’été 2020, soit plus d’un an avant les législatives et à une époque où les intentions de vote en faveur du SPD étaient calamiteuses (1). À ceux qui leur prédisaient une défaite cuisante, les proches du vice-chancelier répétaient que ces sondages se retourneraient dans la dernière ligne droite de la campagne quand les électeurs, prenant conscience du départ imminent d’Angela Merkel et soucieux avant tout de stabilité dans un monde particulièrement anxiogène, se tourneraient vers le candidat incarnant le mieux la continuité avec le gouvernement de la chancelière : un rôle taillé pour Olaf Scholz, ministre des Finances et vice-chancelier d’une Angela Merkel à qui il ressemble par son côté gestionnaire plus que visionnaire, mais aussi par son pragmatisme, sa …