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La longue marche vers la dédollarisation

15 août 1971. Dans la torpeur de l’été, Richard Nixon prend le monde par surprise. Il annonce la fin de la convertibilité du dollar en or. Une décision unilatérale qui enterre les accords de Bretton Woods, conclus en 1944 lors d’une conférence internationale par l’ensemble des puissances alliées. La guerre n’était pas finie, mais son issue ne faisait plus de doute. Bretton Woods consacre la prééminence du dollar. Logique, les États-Unis étant alors la puissance dominante. Désormais, le dollar est l’astre autour duquel gravitent les monnaies des autres pays, liées par un taux de change fixe. Le dollar, lui, est indexé sur l’or. Une once de métal jaune vaut 35 dollars. Toute banque centrale d’un pays autre que les États-Unis peut en revanche obtenir la conversion en or des dollars qu’elle possède à ce taux de 35 dollars.

Dans les faits, c’est la Réserve fédérale de New York qui détient la majeure partie du stock d’or mondial. Dans ses sous-sols, il y a des box pour chaque pays où sont gardées ses réserves d’or. Ce sont les agents de la FED de New York qui déplacent les barres de 12,5 kilos d’un box à l’autre, en fonction de la situation économique et financière des uns et des autres. Le général de Gaulle avait vexé les États-Unis lorsque, dans les années 1960, il avait exigé de rapatrier une partie des stocks d’or de la France à Paris, dans les coffres de la Banque de France.

Pour que Bretton Woods fonctionne correctement et que les États-Unis puissent répondre à toute demande de conversion de dollars en or, il fallait que les stocks de métal jaune des États-Unis ne diminuent pas par rapport à la masse de dollars détenus par les banques centrales des autres pays. Or l’Amérique, dans les années 1960, et sous les présidences démocrates, a fait marcher la planche à billets pour financer la guerre du Vietnam et la course à l’espace face aux Soviétiques. Dès lors, avec cette masse de dollars à l’extérieur qui grossissait, les Américains ne pouvaient plus assurer la conversion des dollars en or sur la base de 35 dollars l’once. Dans la foulée de sa décision, Richard Nixon signera avec l’Arabie saoudite un accord où les prix du pétrole brut se négocieront en dollars. En 1976, les accords de la Jamaïque définissent les nouvelles règles du système monétaire international. Les changes fixes ont vécu. Vive les changes flottants !

Les monnaies fluctuent désormais en fonction de l’offre et de la demande. Dans les faits, le dollar reste la monnaie dominante et de beaucoup. Sa valeur est basée sur la pleine confiance et le crédit dans le gouvernement américain en tant qu’émetteur. La puissance de la devise américaine repose sur des critères objectifs. Les États- Unis sont — et de loin — la première économie mondiale, mais aussi la première puissance militaire, avec des bases dans la plupart des régions du monde. C’est le berceau des nouvelles technologies, de la finance mondialisée. Et, surtout, le dollar …