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L'homme qui a rompu avec le Hamas

Né le 5 mai 1978 à Ramallah, Mosab Hassan Yousef est le fils aîné du prédicateur palestinien Hassan Yousef, membre fondateur du Hamas.

Mosab Hassan est célèbre pour avoir été, entre 1997 et 2007, l’un des plus importants informateurs du Shin Bet (service de sécurité intérieure israélien), spécialement durant la seconde Intifada.

Arrêté par le Shin Bet en 1996 alors qu’il était étudiant à l’université Bir Zeit, à cause d’une arme qu’il avait achetée, il accepte de collaborer (secrètement) avec Israël en échange de sa libération puis — dit-il — par réelle conviction. Au fil des ans, en effet, Mosab Hassan s’est imposé comme un contempteur particulièrement virulent du Hamas, de ses méthodes terroristes et de ses chefs. Cette organisation, à ses yeux, doit être éradiquée et ses dirigeants exécutés.

En 2007, après avoir mis un terme à sa collaboration avec le Shin Bet et s’être converti au christianisme, il quitte la Cisjordanie pour les États-Unis via la Jordanie. Il n’obtiendra le droit de rester dans ce pays que grâce au témoignage de son ancien agent de liaison au Shin Bet, qui se découvre à cette occasion.

Celui qui a permis à Israël d’arrêter de nombreux terroristes palestiniens et de déjouer plusieurs attentats poursuit aujourd’hui son combat par la plume, les conférences et les témoignages engagés (au lendemain du 7 octobre, il s’est rendu sur les lieux du massacre). Avec toujours la même passion.

I. L.

Isabelle Lasserre — Quand et pourquoi avez-vous rompu avec votre père (1) et avec le Hamas ?

Mosab Hassan YousefLa question est plutôt de savoir si j’ai ou non définitivement rompu avec mon père. Je ne le sais pas moi-même. Lui et moi venons de la même source mais appartenons à des mondes antagonistes. C’est l’origine profonde du conflit qui nous oppose. Je crains que, tant que nous ne nous serons pas réconciliés, je continuerai à vivre dans le chaos. Et si mon père et moi, qui avons le même ADN, ne sommes pas capables de nous réconcilier, comment penser que le reste du monde le pourrait ?

I. L. — À quels indices avez-vous réalisé que le Hamas trahissait ses objectifs tels que vous les aviez acceptés au départ ?

M. H. Y. — Dès le début, à sa création en 1987, il était évident qu’il existait un fossé entre la théorie — la liberté, l’humanité et l’émancipation —, qui n’était que fantasme, et la réalité. Ce fossé n’a cessé de s’agrandir au fil des années, au fur et à mesure que le Hamas s’est transformé en organisation totalitaire. Pourquoi ? Parce que le Hamas prétendait libérer les Palestiniens aux dépens des Israéliens. Le droit au retour promettait de faire revenir un groupe tout en en chassant un autre — et cela bien que les Juifs, qui sont nés sur cette terre, qui l’ont fait fructifier grâce à leur travail acharné jusqu’à créer une superpuissance au Moyen-Orient, fussent parfaitement en droit d’y rester. Le Hamas luttait pour le droit des personnes déplacées. Mais lesquelles ? Toutes les guerres ont leurs déplacés, à commencer par les deux guerres mondiales. Les Juifs ont été déplacés, chassés du monde arabe, victimes de purification ethnique. Alors, oui, il y a eu des Arabes déplacés qui ont décidé de partir après leur défaite. Mais ils ne sont pas les seuls ! Le problème, c’est que le Hamas n’accepte jamais la réalité. Son idéologie est vouée à l’échec. Ne reposant que sur des mensonges et de fausses croyances, elle ne peut produire que de la violence. On a vu le 7 octobre une illustration de cette différence entre la théorie et la pratique. En théorie, tout le monde pouvait adhérer à la formidable idée du Hamas, la libération des Palestiniens. À l’arrivée, le Hamas s’est rendu coupable d’un génocide.

I. L. — Qu’avez-vous personnellement ressenti le 7 octobre 2023, pendant le pogrom du Hamas contre Israël ?

M. H. Y.Je n’ai pas été surpris par la brutalité de l’attaque mais par son ampleur. Le pogrom du 7 octobre donne une idée de ce qui peut se passer ailleurs si le Hamas consolide son pouvoir. L’utilisation des boucliers humains, le sacrifice des civils sont ses principales armes. Les dirigeants du groupe terroriste ont conduit les Palestiniens dans une impasse. Mais il faut les prendre au sérieux lorsqu’ils affirment vouloir détruire la civilisation occidentale, à laquelle appartient Israël. Le conflit entre Israël et le Hamas n’est qu’une projection du combat …