Peu de temps avant sa nomination au poste de président du Conseil européen, Antonio Costa s'est confié à Politique Internationale
Gaspard Estrada — En 2015, au moment où vous êtes devenu premier ministre, votre pays était en plein marasme économique et social. Neuf ans plus tard, le Portugal a le vent en poupe. Quelles sont les recettes de ce « miracle » portugais ? Est-ce que certaines d’entre elles vous semblent transposables au continent européen ?
Antonio Costa — Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un « miracle », mais du résultat de bonnes décisions politiques et de bonnes politiques publiques. En 2015, il y avait un grand débat pour savoir s’il fallait maintenir l’austérité afin de rester dans la zone euro ou s’il fallait sortir de l’euro afin d’en finir avec l’austérité. Notre message a consisté à dire qu’en changeant de politique économique il était possible de rester dans l’euro, de réduire la dette et de rétablir une situation budgétaire stable. Ce que notre expérience a prouvé, c’est qu’on pouvait le faire : lorsqu’on a tourné la page de l’austérité, la croissance et l’emploi sont revenus, ce qui a soutenu le processus de réduction de la dette. C’est ainsi que notre procédure de déficit budgétaire excessif s’est transformée en surplus budgétaire structurel, que nous avons quitté le podium des pays les plus endettés de la zone euro pour nous diriger vers une trajectoire de réduction soutenable de la dette, laquelle est aujourd’hui repassée en dessous des 100 % du PIB.
G. E. — Parmi toutes les mesures que vous avez prises à ce moment-là, quelle a été la plus importante ?
A. C. — L’emploi, l’emploi et l’emploi, car la réduction du chômage de 12 % à 6 % a permis de transformer notre économie et d’investir dans la formation et l’innovation. Ce qui tire la croissance du Portugal vers le haut, c’est essentiellement l’investissement des entreprises.
G. E. — Avant de devenir premier ministre, vous avez été parlementaire, ministre et maire de Lisbonne. Quels sont les principaux enseignements que vous avez tirés de ces expériences et qui vous ont servi par la suite en tant que chef du gouvernement ?
A. C. — Je suis le premier chef de l’exécutif ayant occupé préalablement des fonctions régaliennes au sein d’un gouvernement, à la justice et à l’intérieur. Cette expérience m’a permis d’avoir une vision globale de la tâche qui m’attendait. Mon mandat de maire a également été essentiel car il m’a appris à travailler au plus près des gens. L’exercice de la fonction municipale implique une présence et une réactivité permanentes, ce qui m’a été très utile dans mes activités ultérieures.
G. E. — Afin de sortir le Portugal de l’austérité, vous avez dû négocier avec la « troïka » (CE, BCE et FMI). Quels étaient les principaux enjeux de ces négociations ?
A. C. — Formellement, la troïka avait conclu le programme d’ajustement structurel, mais mon pays faisait encore face à la procédure de déficit excessif (notre déficit était supérieur à 4 % du PIB et la dette publique dépassait 130 % du PIB). Qu’avons-nous …
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