Dix ans presque jour pour jour après la signature des accords d'Oslo qui laissaient entrevoir la perspective d'une paix durable au Proche-Orient, le gouvernement israélien adoptait le principe de l'éviction de son ancien partenaire, le leader palestinien Yasser Arafat. Cette façon très particulière de commémorer la fameuse poignée de main Rabin-Arafat en dit long sur le bouleversement radical qu'ont connu les rapports entre Israéliens et Palestiniens. Désormais, c'est la guerre qui est à l'ordre du jour - une guerre d'usure qui a fait plus de 3 000 morts, en majorité des civils (1), et a profondément perturbé les deux sociétés. Les barrages permanents sur les routes, les couvre-feux, l'encerclement, puis la réoccupation des villes et des villages ont désorganisé l'existence quotidienne des Palestiniens. Du côté israélien, la multiplication d'attentats-suicides extrêmement meurtriers (plus d'une centaine) a durablement traumatisé la population. L'univers mental des uns et des autres, en particulier des enfants, est habité par cette violence quotidienne. Les conséquences économiques sont, elles aussi, très négatives. Chez les Palestiniens, le chômage enregistre des taux records (60 % à Gaza), la pauvreté progresse de façon inquiétante, l'économie est quasiment à terre. En Israël, l'Intifada a ruiné certains secteurs comme le tourisme, précipité la baisse des investissements étrangers et alourdi le budget de l'État, accentuant ainsi le marasme général (2).
Pourtant, début juin, la rencontre d'Akaba qui réunissait, autour d'Abdallah II de Jordanie et du président Bush, les deux premiers ministres, Ariel Sharon et Mahmoud Abbas, avait soulevé bien des espoirs. Cette réunion au sommet témoignait d'une volonté inédite de l'administration républicaine de redonner un second souffle à des négociations qui étaient au point mort depuis le printemps 2001. Elle fut aussi l'occasion d'engagements publics particulièrement forts, Ariel Sharon reconnaissant aux Palestiniens le droit de disposer d'un État tandis que son homologue palestinien condamnait la militarisation de l'Intifada. Elle permit, surtout, la relance officielle du processus diplomatique autour de la " feuille de route " rédigée par le Quartet (États-Unis, Union européenne, ONU, Russie).
De toute cette agitation diplomatique, il ne reste pas grand-chose. Sur le terrain, assassinats ciblés et attentats se répondent avec une régularité de métronome. Israéliens et Palestiniens s'accusent à nouveau mutuellement de ne pas avoir tenu leurs promesses. Quant à la feuille de route, elle est moribonde alors qu'elle n'a pas même connu un début d'application. Tout cela donne une pénible impression de déjà-vu. Pourquoi ne parvient-on pas à sortir de l'ornière ? Avant de répondre à cette question, revenons d'abord à cette fameuse " feuille de route "...
Atouts et limites de la " feuille de route "
Ce document, élaboré par le Quartet au cours de l'année passée, officiellement adopté en décembre 2002, rendu public le 30 avril 2003 après la nomination de Mahmoud Abbas au poste de premier ministre, vise à parvenir, en trois étapes, à un règlement définitif fondé sur la coexistence de deux États, un " État palestinien indépendant, démocratique et viable " étant appelé à voir le jour à côté d'Israël. La première phase, …
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