En octobre 2002, Luís Inácio Lula da Silva, couramment appelé " Lula ", a été élu pour quatre ans président de la République fédérative du Brésil, avec 61,3 % des suffrages exprimés, soit 52,8 millions de voix. Jamais avant lui un chef d'Etat brésilien n'avait séduit autant d'électeurs. Mais plus encore que son score, ce sont ses origines sociales très modestes et les drapeaux rouges de la formation dont il est le chef historique qui ont retenu l'attention au Brésil comme à l'étranger : dans ce pays où le pouvoir a toujours été aux mains des élites, c'est à présent le dirigeant historique du Parti des travailleurs (PT) qui siège au Planalto (le palais de l'Elysée brésilien).
Un ancien ouvrier au pouvoir
Le vingtième président du Brésil n'est pas, contrairement à ses prédécesseurs, un sociologue de renommée internationale (Fernando Henrique Cardoso, 1995-2002), un ancien ingénieur civil (Itamar Franco, 1992-1994), le directeur d'un groupe de presse (Fernando Collor de Mello, 1990-1992) ou un membre de l'Académie des Lettres (José Sarney, 1985-1989). Il n'est pas non plus officier supérieur ou avocat, comme tous les présidents d'avant 1985. Lula n'est même pas un fils de bonne famille, loin de là. Ses parents étaient des paysans très pauvres et analphabètes. Enfant, il doit fuir, avec sa famille, la misère des campagnes de l'Etat de Pernambuco (région du Nordeste) ; à 12 ans, il arrête l'école pour exercer divers petits métiers. Six ans plus tard, il est ouvrier tourneur, profession qu'il exercera pendant une douzaine d'années, dont les dernières comme contremaître. Cette promotion sociale était déjà statistiquement rare pour des personnes de son origine sociale. La suite sera encore plus exceptionnelle. En 1969 - notamment sous l'influence de son frère aîné -, il entre dans le syndicalisme. Il est élu, en 1975, à la présidence du syndicat des métallurgistes des banlieues industrielles de São Paulo (environ 100 000 membres). Dès lors, bien qu'il demeure quotidiennement au contact des ouvriers, il s'engage dans une autre vie.
Fervent orateur et habile organisateur, il souhaite voir les syndicats s'éloigner de leurs pratiques corporatistes traditionnelles et s'émanciper de la tutelle partielle de l'Etat. Au printemps 1980, il est le leader des premières grandes grèves qu'aura à affronter le régime militaire instauré en 1964, ce qui lui vaut un mois de prison et, surtout, une rapide notoriété auprès des couches politisées du pays. Profitant alors du retour au multipartisme, il cofonde le Parti des travailleurs (PT), formation qui mêle, à l'époque, des courants et des groupuscules d'inspirations diverses : principalement le socialisme (de conception sociale-démocrate, léniniste ou trotskiste) ; le catholicisme (modéré ou proche de la théologie de la libération) ; le tiers-mondisme ; et le pragmatisme syndical. Dès sa fondation, le PT se choisit Lula pour président, poste qu'il conservera jusqu'en 1987, année où il est nommé président d'honneur du parti. En 1982, il brigue le fauteuil de gouverneur de l'Etat de São Paulo et réalise, pour sa première campagne électorale, un score nettement supérieur à celui que prévoyaient …
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