Les Grands de ce monde s'expriment dans

Les sages recettes du FMI

Babette Stern - Lorsqu'on vous a proposé la direction du FMI au lendemain de la démission-surprise de Horst Köhler, la décision a-t-elle été facile à prendre ?
Rodrigo de Rato - Quand mon prédécesseur a annoncé sa démission, très vite mon nom est apparu dans la presse internationale. C'était dix jours avant les élections en Espagne. À ce moment-là, mes collègues européens de l'Ecofin (1) et ceux d'Amérique latine, membres de la Banque interaméricaine de développement, m'ont demandé si j'étais prêt à accepter le poste : j'ai dit oui. J'ai ensuite effectué une série d'allers et retours entre Madrid et Washington afin de rencontrer le plus grand nombre possible de gouverneurs du FMI, notamment les Africains.
B. S. -Quel a été leur message ?
R. R. - Ils ont insisté pour que le FMI reste présent en Afrique et développe un dialogue constructif avec eux. Je m'y suis engagé. Je me suis rendu deux fois sur le continent africain au cours des six premiers mois de mon mandat et j'y ai rencontré une trentaine de chefs d'État et de gouvernement.
B. S. - Comment gérez-vous ces deux vies : celle de l'homme politique espagnol qui conserve des liens très étroits avec son parti et celle de directeur général du FMI astreint à un devoir de réserve ?
R. R. - Il n'y a pas d'incompatibilité. Je reste membre du Parti populaire mais je n'exerce aucune responsabilité au sein de cette formation, je n'occupe aucun poste ni dans ses structures ni dans son organigramme et je n'appartiens à aucune commission. Je sais pertinemment que je ne peux pas participer au débat politique en Espagne tant que je suis à la tête du FMI. Cela ne m'empêche pas d'avoir des idées comme tout le monde. J'ai parfois des contacts avec mes collègues. Mais je ne me mêle pas de politique. Pour le moment.
B. S. - Avez-vous renoncé à la politique ?
R. R. - Qui peut savoir ce que réserve l'avenir ? Disons que, pour l'instant, ce n'est pas ma préoccupation. Je concentre mon énergie sur le FMI.
B. S. - Vous êtes le premier directeur général issu de la classe politique. Est-ce un atout pour le FMI ?
R. R. - Pour diriger une institution comme celle-ci, il vaut mieux avoir eu un parcours personnel et professionnel riche. Mais il n'y a pas d'expérience meilleure que d'autres. Michel Camdessus a longtemps occupé des postes de responsabilité au sein de la haute administration française ; Horst Köhler avait, lui, une double expérience au ministère des Finances allemand et comme président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Ils en ont fait profiter le FMI. Je fais de même. Les pays membres ont sans doute estimé que mon profil d'ancien parlementaire et d'ancien ministre correspondait aux besoins du FMI au moment où celui-ci doit repenser son action.
B. S. - Justement, revenons un peu sur le passé. Tout au long des années 1990, on a reproché au FMI …