" Pour la Chine, le XIXe siècle a été celui de l'humiliation, le XXe celui de la restauration, le XXIe sera celui de la domination. " La formule, entendue dans la capitale de l'Empire, provoque toujours une vive réaction, négative, de la part des dirigeants du pays. Se faisant leur porte-parole, Wu Jianmin, l'ancien ambassadeur de Pékin en France, aujourd'hui président de l'Institut de diplomatie de Chine, expliquait récemment (1) que son pays n'avait jamais eu, dans sa longue histoire, d'ambitions dominatrices, que jamais il n'en aurait dans l'avenir - et que si, par hasard, il lui en venait l'idée, le peuple chinois ne l'accepterait pas. Abondant dans le même sens, l'ancien président français Valéry Giscard d'Estaing rappelait que " la Chine est étrangère à toute forme d'impérialisme ", qu'" elle n'aspire aucunement à la conquête territoriale de la planète " et que " comme les Américains, les Chinois ne se sentent pas intéressés par le reste du monde " (2).
La dernière session de l'Assemblée nationale populaire (le " parlement " du pays), qui s'est tenue du 5 au 14 mars dans la capitale chinoise, a montré néanmoins que les dirigeants du Parti communiste ne sont pas insensibles à l'image qu'ils donnent d'eux-mêmes dans l'opinion mondiale. D'une manière symptomatique, deux thèmes ont émergé des travaux très " dirigés " de cette assemblée de 3 000 " élus ". Des thèmes symbolisés par deux slogans : la " société harmonieuse " et l'" émergence pacifique ". Ces deux concepts confirment que l'équipe au pouvoir depuis novembre 2002 - le couple Hu Jintao et Wen Jiabao -, celle dite de la " quatrième génération ", est particulièrement préoccupée par les déséquilibres que provoque l'actuelle révolution industrielle. Ces déséquilibres sont internes : en particulier, des inégalités sociales d'une ampleur inouïe. Mais ils sont aussi externes : Pékin a compris que l'irruption de l'Empire dans l'économie mondiale pouvait être un facteur de déstabilisation et risquait de provoquer, en de nombreux endroits, une attitude de rejet à son égard. Ce qui, à terme, pouvait remettre en cause la poursuite du développement économique du pays.
De fait, si l'on met de côté l'adoption de la loi anti-sécession vis-à-vis de Taiwan, les principales décisions de cette session parlementaire s'inscrivent toutes dans cette double perspective. Avec la généralisation de la gratuité de la scolarité et la suppression de l'impôt paysan, le Parti communiste veut œuvrer à la constitution d'une " société harmonieuse ". Il espère, par ce biais, contribuer à réduire les disparités sociales (entre les citadins et les ruraux) et atténuer les tensions que celles-ci sont susceptibles de susciter. En rendant publique sa volonté de ralentir son expansion commerciale (les exportations qui avaient crû de 35 % en 2004 ne devraient plus augmenter " que " de 15 % en 2005) et d'assouplir son système de change (sans renoncer brutalement au " peg " qui lie, d'une manière fixe depuis 1994, le yuan au dollar), Pékin souhaite faciliter son insertion dans le système économique international et …
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