Pour sonder les zones d'ombre de l'actualité internationale, nous avons sollicité les meilleurs experts. Mais il nous est apparu indispensable d'accueillir, également, ceux qui font cette actualité. Que plusieurs de ces " acteurs " aient choisi notre Revue pour aller plus loin dans la réflexion ou la confidence - et cela, souvent, pour la première fois - constitue, à n'en point douter, un hommage que nous ne sous-estimons pas : de Viktor Iouchtchenko (le nouveau Président de l'Ukraine) à Mohammed Dahlan (probablement le ministre le plus influent de l'Autorité palestinienne) , de Mohammad Khatami (le Président iranien) au célèbre dissident cubain Vladimiro Roca, ce Numéro de printemps étonnera par la liberté de ton de ceux qui s'y expriment.
" Il n'est point nécessaire que toutes les questions trouvent leur réponse. Pour les plus importantes, c'est déjà beaucoup qu'elles aient été posées " - écrivait, au XIXe siècle, l'auteur dramatique allemand Friedrich Hebbel. Notre Rédaction a souhaité, ce trimestre, faire mentir Hebbel en apportant des réponses éclairantes aux principales interrogations du moment.
Celles-ci, par exemple :
Quelles seraient les conséquences concrètes d'un " non " français au référendum sur le projet de Constitution européenne ? Quel crédit accorder à ceux qui prétendent qu'un tel refus n'engendrerait pas nécessairement d'épouvantables turbulences et que l'Europe pourrait, enfin, se reconstituer selon un schéma moins ambitieux ? Au-delà même du " cas français ", comment procéder pour endiguer la poussée des europhobes sur ce Vieux Continent où - nous indiquent les sondages - l'euroscepticisme n'a cessé de croître depuis 30 ans ?
Les " révolutions douces " qui ont jeté à bas des régimes discrédités en Serbie, en Géorgie et en Ukraine sont-elles un phénomène contagieux, voire irrépressible ? Ce même phénomène est-il susceptible d'embraser, un jour, l'Asie centrale ? Est-il imaginable qu'il s'étende à certains de ces Etats que l'administration américaine a qualifiés de " postes avancés de la tyrannie " - du Zimbabwe à la Biélorussie en passant par Cuba ?
Après un premier mandat plutôt musclé, comment George W. Bush concevra-t-il, désormais, son rôle de " croisé de la démocratie " ? Sa rhétorique libératrice doit-elle réellement être prise au premier degré ?
Deux années après la chute de Saddam Hussein, de quoi l'avenir de l'Irak est-il fait ? Le nouveau gouvernement irakien sera-t-il à la hauteur de l'enjeu ? Le pays échappera-t-il au spectre de la guerre civile ? Après avoir participé en nombre aux élections pour exprimer leur dégoût rétrospectif de la dictature et leur refus du terrorisme, les Irakiens de toutes appartenances choisiront-ils de renoncer au chaos ?
L'évacuation - décidée par Ariel Sharon - des implantations de la bande de Gaza et du nord de la Cisjordanie est-elle le prélude à un accord durable entre Palestiniens et Israéliens ? L'espoir soufflerait-il enfin sur cette terre trop promise ?
Le sursaut démocratique qui a saisi les Libanais et les pressions internationales exercées sur Damas aboutiront-ils, finalement, à une véritable " désyrianisation " du Liban ?
La levée de l'embargo sur les ventes d'armes à Pékin, projetée par l'Union européenne, ne serait-elle pas une terrible erreur ? Les maîtres de la Chine n'interpréteraient-ils pas aussitôt cette inutile bienveillance comme une sorte de " feu vert ", comme un acquiescement à toute initiative belliqueuse dans le détroit de Taiwan ?
Sur tous ces sujets brûlants, nous avons braqué le projecteur. En respectant, comme toujours, la variété des points de vue. En privilégiant cette diversité dont Montaigne se plaisait à dire qu'elle est " la plus universelle des qualités de l'esprit ".
À toutes et à tous : bonne lecture.