Marie Holzman - La dernière session plénière de l'Assemblée nationale chinoise, qui s'est déroulée durant la première quinzaine de mars, a provoqué de vives réactions. Elle a, en effet, débouché sur deux décisions importantes : l'annonce d'une augmentation du budget alloué aux dépenses militaires et le vote d'une loi " anti-sécession " visant explicitement Taiwan. Parallèlement, les États-Unis ont demandé au Japon et à la Corée du Sud de se ranger à leur côté en cas de conflit avec la Chine. Y voyez-vous l'annonce d'un regain de tension dans la région ?
Michel Bonnin - Ces mesures confirment que les autorités chinoises envisagent la possibilité d'une intervention militaire contre Taiwan. Mais ce n'est pas vraiment une nouvelle ! La promulgation d'une loi anti-sécession - votée à 2896 voix contre zéro - permet simplement de légitimer une attitude qui ne date pas d'hier. On peut dire que la promulgation d'une loi fait partie de ce que les responsables chinois considèrent comme une modernisation de leur système : il s'agit de donner une forme juridique à l'arbitraire du pouvoir. Les choses sont à présent clairement établies. Du coup, au niveau international, cette loi pourrait avoir un effet relativement stabilisateur en décourageant les dirigeants taiwanais d'aller plus loin dans leurs velléités indépendantistes. Mais il suffit de lire le texte de cette loi pour comprendre que le gouvernement de Pékin s'est réservé une marge de manœuvre confortable : en effet, le texte ne définit pas très clairement dans quelle situation la guerre peut être déclarée. L'article VIII de cette loi stipule que, " si toutes les possibilités d'une réunification pacifique sont complètement épuisées, l'État emploiera des moyens non pacifiques et d'autres mesures pour protéger la souveraineté de la Chine et son intégrité territoriale ". Pékin se laisse donc la possibilité d'estimer à quel moment " les possibilités sont épuisées ". En clair, les dirigeants communistes ne veulent pas que le statu quo actuel se perpétue à l'infini. Cette perspective est inquiétante pour l'avenir, notamment si le Parti estime qu'il a besoin d'une tension militaire pour rétablir l'unité à l'intérieur du pays... Quant à l'augmentation de 12,8 % du budget militaire, faut-il vraiment la prendre au sérieux ? Le budget militaire chinois est un vrai secret d'État, et les chiffres annoncés ne correspondent peut-être qu'à la moitié des dépenses réelles. Il faut plutôt y voir un geste symbolique de Hu Jintao - l'actuel président de la République et secrétaire général du Parti communiste - à l'égard du seul corps qui compte à ses yeux : l'armée. N'oublions pas que Hu vient de succéder officiellement à Jiang Zemin au poste de président de la Commission des affaires militaires ; en fait, il a tout simplement reproduit le même geste que son prédécesseur. En arrivant à ce poste, il y a treize ans, Jiang avait, lui aussi, annoncé qu'il augmenterait de près de 13 % le budget militaire. Cela dit, il faudra suivre l'évolution sur le long terme. Ce qui me paraît plus inquiétant, c'est que l'Ukraine …
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