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GAZ NATUREL : LA GRANDE ILLUSION

Dans un contexte énergétique mondial marqué par un accroissement plus rapide que prévu de la demande, une forte hausse des prix du pétrole et un épuisement progressif des réserves pétrolières, le gaz naturel apparaît à première vue comme la source d'énergie la plus apte à répondre aux attentes des pays consommateurs. Considéré, jusqu'aux années 1970, comme un parent pauvre du pétrole, le gaz naturel a rapidement acquis ses lettres de noblesse et figure désormais parmi les sources d'énergie les plus appréciées, surtout dans les centrales électriques, l'industrie et le secteur résidentiel-tertiaire. Cette montée en flèche, le gaz naturel la doit à plusieurs avantages que les économistes et les observateurs ne se lassent pas de mettre en exergue : 1°) des réserves qui ne cessent de croître et qui compensent très largement le volume extrait des gisements ; 2°) des émissions de gaz à effet de serre moins élevées ; 3°) et, jusqu'à récemment du moins, des prix à la consommation inférieurs à ceux du pétrole.
Pour ce qui est du problème crucial de la sécurité des approvisionnements, le credo - répété depuis le premier choc pétrolier de 1973 - selon lequel le gaz serait plus « sûr » que le pétrole a subi un sérieux démenti en janvier 2006. On s'en souvient : la Russie a alors brutalement interrompu ses livraisons à une Ukraine qui grelottait de froid et, peu de jours plus tard, un mystérieux « accident » a mis hors service le gazoduc qui livre du gaz russe à la Géorgie. Toujours l'hiver dernier, le géant russe Gazprom a, pour cause cette fois-ci de vague de froid en Russie et d'accroissement des besoins internes, réduit ses livraisons à l'Allemagne, à l'Autriche et à l'Italie.
Le problème de la sécurité des approvisionnements mérite d'autant plus d'attention que les échanges gaziers mondiaux progressent à vive allure et que les fournisseurs actuels et potentiels ne sont pas nombreux. Contrairement, là aussi, à une idée reçue, la répartition géographique des réserves n'est pas moins inégale que celle du pétrole. Qu'on le veuille ou non, l'offre sera de plus en plus dominée par trois grandes zones d'exportation : la Russie, le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.
Une demande en forte croissance
De tous les combustibles fossiles, qui couvrent aujourd'hui près de 80 % du total de la consommation mondiale d'énergie primaire, le gaz naturel est celui qui continue d'enregistrer la progression la plus rapide. Les besoins gaziers mondiaux ont quasiment triplé, passant de 895 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) en 1971 à 2 420 millions de tep en 2004. Dans le même temps, la demande pétrolière progressait de 56 % et celle du charbon de 86 %. Au cours des trente-cinq dernières années, la part du gaz dans la couverture de la demande mondiale d'énergie primaire a ainsi bondi de 15,9 % à 21,2 %, pendant que la part du pétrole chutait de 43,6 % à 35,6 %.
Cette forte avancée du gaz sur la scène énergétique s'explique tout d'abord par une …