Angela Merkel gouverne l'Allemagne depuis novembre 2005. Tiraillée entre les directives européennes, l'alliance avec les États-Unis et les contraintes du marché mondial, elle n'a pas vraiment les coudées franches en matière de politique étrangère. Pas plus qu'à l'intérieur d'ailleurs, où la tâche visant à remettre le pays d'aplomb se révèle ardue, d'autant que la crise de décroissance démographique et de désindustrialisation amoindrit les capacités d'action du gouvernement. Les politiques estiment que l'ex-RDA atteindra d'ici dix à vingt ans le rang économique de l'Allemagne de l'Ouest, plus tard qu'initialement prévu. Mais l'égalisation ne se fera-t-elle pas plutôt parce que l'Allemagne occidentale descendra au niveau de l'ex-RDA ? Dans une certaine mesure, elle en prend le chemin.
Pour la première fois depuis sa résurrection sous forme de deux États, en 1949, après la catastrophe de 1945, l'Allemagne se trouve à la croisée des chemins. Tout se passe comme si les problèmes qu'elle aurait dû prendre en compte lors de la réunification, en 1990, mais que l'euphorie d'alors avait occultés, refaisaient surface. L'Allemagne est-elle, une fois de plus, la « nation en retard », dont le sociologue Helmuth Plessner (1) épinglait l'immaturité et les complexes ?
Le célèbre « capitalisme rhénan » (2), qui avait fait la fortune de l'Allemagne depuis un siècle et demi, s'est effacé devant le « capitalisme financier » à la manière anglo-saxonne. Les grandes entreprises se délocalisent à l'étranger et exportent des produits portant le label « made in Germany », mais fabriqués en République tchèque, en Turquie, au Mexique ou en Indonésie. Quant au paysage politique, dominé jusqu'à la réunification allemande par deux grandes forces de centre droit et de centre gauche (l'Union chrétienne-démocrate CDU/CSU et le parti social-démocrate SPD) avec l'appoint de deux petits partis (le FDP libéral et les Verts), il est en train de se morceler. En 2005, de 160 000 (chiffre officiel) à 250 000 (chiffre probable) Allemands, surtout des jeunes qualifiés, se sont expatriés. Il s'agit de l'émigration la plus forte depuis 122 ans. La même année, le nombre des décès a dépassé de 144 000 celui des naissances. L'Allemagne rétrécit comme une peau de chagrin.
Telle une supernova, l'Allemagne pourrait s'effondrer sur elle-même. Pour échapper à ce funeste destin, elle doit s'imposer une refondation radicale assortie d'une réfection de la cave au grenier avec, en prime, la démolition des fioritures superfétatoires. Car la République de Berlin ne peut plus mener la vie luxueuse de la République de Bonn. À l'arrivée d'Helmut Kohl au gouvernement en 1982, l'impôt grevait le revenu moyen du citoyen à hauteur de 35 % (52 % en 2006) ; le niveau de vie se situait au troisième rang européen après la Suisse et le Liechtenstein (aujourd'hui il est en treizième position) ; la dette cumulée de l'État plafonnait à 800 milliards de deutscheMark (à présent 1 447 milliards d'euros, soit les deux tiers du PIB ou 17 552 euros d'endettement par habitant). Concernant la compétitivité de son industrie (3), l'Allemagne a rétrogradé fin 2006 de deux places …
Ce site est en accès libre. Pour lire la suite, il vous suffit de vous inscrire.
J'ai déjà un compte
M'inscrire
Celui-ci sera votre espace privilégié où vous pourrez consulter à tout moment :
- Historiques de commandes
- Liens vers les revues, articles ou entretiens achetés
- Informations personnelles