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COREE DU NORD: L'EXTRAVAGANT ACCORD

Décidément, l'expérience ne sert à rien ni à personne. L'accord auquel sont parvenus, le 13 février, les six membres des pourparlers sur la Corée du Nord (États-Unis, Chine, Russie, Japon, Corée du Sud, Corée du Nord) est souvent présenté comme un moyen d'empêcher Pyongyang de procéder à un deuxième essai et, surtout, comme une première étape vers la résolution du problème nucléaire nord-coréen (1). En réalité, il n'y a eu aucun accord, mais plutôt - nuance que les juristes apprécieront - une « déclaration commune » (2). Celle-ci est, de surcroît, très partielle, car elle ne concerne que la fermeture du réacteur de Yongbyon, le retour des inspecteurs de l'AIEA et la tenue de vagues « discussions » (3) sur les programmes nucléaires (4) de la Corée du Nord. Il n'y est question ni des quantités de plutonium dont dispose Pyongyang (5), ni des six à dix armes constituées dont on crédite le pays, ni du programme d'enrichissement qui avait ouvert une crise majeure à l'automne 2002 (6), ni des importantes capacités balistiques (7) ou des velléités explicites d'exportation des matières nucléaires dont se targue le régime (8). L'idée que l'on puisse ainsi tester la volonté nord-coréenne de mettre fin à son programme nucléaire, tout en ayant la possibilité d'interrompre à n'importe quel moment la coopération si Pyongyang ne respecte pas ses obligations, résiste difficilement à l'analyse ! En réalité, ce texte n'est pas fait pour être appliqué, mais pour entretenir un processus diplomatique à l'ombre duquel Pyongyang pourra poursuivre son chantage. Ce point a été illustré dès la nouvelle session de pourparlers à Pékin, ouverte le 16 mars, et qui a dû être suspendue trois jours plus tard.Ce que veulent, en effet, cinq des six pays - le Japon a émis des critiques immédiates et ne participera pas à la mise en oeuvre de l'accord dans son état actuel -, c'est montrer que la négociation continue après la première déclaration commune du 19 septembre 2005. Cette déclaration n'a eu aucune suite pendant un an et demi, si ce n'est une aggravation de la situation tant dans le domaine balistique (de nouveaux tests ont eu lieu) que dans le domaine nucléaire (essai du 9 octobre 2006). Certes, on peut produire à l'arraché, au petit matin, quand les délégations sont exténuées, un « mécanisme de mise en oeuvre » des engagements de 2005 (9). Mais quelques heures après sa signature, Pyongyang insistait déjà sur le caractère « transitoire » de la suspension de l'activité du réacteur de Yongbyon et il suffira probablement d'attendre pour voir ce texte rejoindre ses prédécesseurs au cimetière (l'accord de décembre 1991 sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne entre les deux Corées ; le « cadre agréé » d'octobre 1994 entre les États-Unis et la Corée du Nord ; et l'accord du 19 septembre 2005 des pourparlers à six). Quant à la vérification de la déclaration, il est symptomatique que le directeur général de l'AIEA se soit rendu à Pyongyang (10) avant même d'avoir formellement renoué …