Les Grands de ce monde s'expriment dans

VIVE L'ATLANTISME!

À l'été 2007, Nicolas Sarkozy, président nouvellement élu, a choisi de passer ses vacances aux États-Unis - quelques jours de détente ponctués d'une brève rencontre avec le président George W. Bush. En France, certains ont vivement critiqué cette visite, arguant que la politique étrangère du chef d'État américain n'était pas acceptable. Rappelant les bientôt 250 ans d'alliance et d'amitié entre les États-Unis et la France, le président français leur a répondu : « Sur la côte atlantique, tous les cimetières avec des croix blanches », où reposent « de jeunes Américains qui sont venus mourir pour nous », sont bien « plus importants queM. Sarkozy et M. Bush ». Soudain, l'accent était mis sur une idée simple mais essentielle : l'alliance franco-américaine dépasse les hommes, fussent-ils élus. Ils en sont temporairement les dépositaires et les garants, et ils ont la responsabilité de la préserver, de l'entretenir et de la transmettre. C'est bien aux peuples des deux pays que cette alliance a toujours appartenu et continue d'appartenir. Au cours de l'Histoire, elle a été fidèle aux Français et les a bien servis. En France, l'affirmation de ce principe est le signe d'un changement : l'annonce qu'en matière de relations transatlantiques, ce pays a officiellement l'intention de sortir du fantasme aigre dans lequel il se complaisait depuis quelques années pour revenir dans le monde réel. Le signe, aussi, qu'au-delà des préjugés, des tensions passagères et des noms d'oiseaux, Français et Américains sont des amis, se font confiance et partagent un bien plus précieux que tout autre, jamais garanti, que l'on appelle « liberté ». L'attachement à cette valeur, si volontiers proclamé en Amérique, est souvent vu en France comme une naïveté. Et il est vrai que, selon les époques et les politiques, ce concept a servi de prétexte à plus d'une manipulation, à plus d'un crime. Mais même si elle reste difficile à définir, la liberté retrouve soudain son sens dès qu'elle est menacée, l'urgence n'étant plus de l'analyser mais tout simplement de se battre pour la défendre ou la reconquérir.
La nouvelle équipe gouvernementale française semble avoir mesuré la force de cet héritage. Elle reconnaît le besoin d'entraide des deux pays et la nécessité de construire des politiques communes, sans pour autant « s'aligner ». À Washington, le nouveau réalisme français a été, dans un premier temps, accueilli chaleureusement. Certes, rien ne garantit que le futur de la relation transatlantique soit aisé : dans les années qui viennent, les Français risquent d'être déroutés par l'onde de choc qu'a provoquée la présidence radicale de George W. Bush. L'opinion américaine a été bouleversée, entraînée à la hussarde dans des croisades risquées, mal préparées, mal justifiées. Elle va en ressortir méfiante, excessivement prudente. Beaucoup plus durables que l'aventurisme néo-conservateur, certains courants politiques américains, hostiles à l'égard de l'étranger ou même carrément anti-français, héritiers à la fois de l'isolationnisme de droite et de la mauvaise conscience de gauche, vont reprendre toute leur place. Et il faudra alors craindre, non plus que les États-Unis interviennent trop …