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IRAN: UN RAPPORT EXPLOSIF

e coup d'éclat des services américains
Les services de renseignement ont souvent mis leurs gouvernements en difficulté, qu'il s'agisse de taupes travaillant pour l'ennemi ou de transfuges décidant de révéler des activités secrètes ou des réseaux clandestins. La guerre froide est pleine d'histoires de ce type. C'est l'un des risques du métier dont le meilleur narrateur restera pour la postérité John Le Carré. Mais c'est probablement la première fois que toutes les agences de renseignement d'un pays produisent un document qui risque d'anéantir cinq années d'efforts visant à empêcher le principal adversaire de ce pays d'acquérir l'arme nucléaire. C'est pourtant ce qu'ont fait les seize agences de renseignement américaines avec le rapport du National Intelligence Council (NIC) de novembre 2007 sur l'Iran (1). Le président des États-Unis s'est ainsi trouvé dans une position inédite : celle d'avoir à défendre sa politique contre les conclusions d'un rapport de ses services secrets.
La discrétion est, en principe, la marque de fabrique des services de renseignement (2) mais, outre que cette vertu n'a jamais été la mieux partagée aux États-Unis, la longue controverse sur les éléments retenus par l'administration Bush pour décider l'invasion de l'Irak en mars 2003 l'a transformée en vice. Le rapport de l'automne 2002 sur les armes irakiennes avait ignoré les incertitudes de certaines agences. Celui-ci - sur l'Iran - fait très exactement l'inverse (3).
On y voit d'emblée une revanche du monde de l'ombre, lequel n'a apprécié ni les pressions dont il a été l'objet, ni les longues enquêtes sur ses méthodes, ni la révélation de l'identité de l'un de ses agents (Valerie Plame), ni les restructurations récentes - assez peu convaincantes au demeurant.
Mais ce rapport contredit aussi l'estimation réalisée par les agences de renseignement américaines en 2005, trois ans après l'invasion de l'Irak. L'Iran était alors présenté comme « déterminé à développer des armes nucléaires malgré la pression internationale ». Or, comme on le verra plus loin, la CIA aurait déjà été en possession d'un ordinateur portable appartenant à un ingénieur iranien et prouvant que le régime de Téhéran avait interrompu ses activités de militarisation.
Une affaire énigmatique
L'ironie vient du moment choisi pour commettre cette bourde. Le 30 novembre, le nouveau négociateur iranien, Saïd Jalili (un personnage inflexible et proche du président Ahmadinejad), vient à bout de la patience légendaire de Javier Solana en lui indiquant, à Londres, qu'il fallait désormais « repartir de zéro » et ne tenir aucun compte des discussions qui avaient eu lieu avec son prédécesseur, Ali Larijani, ce qui suffisait conformément à la déclaration des Six du 28 septembre à enclencher immédiatement les travaux sur une troisième résolution. Le lendemain, 1er décembre, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité plus l'Allemagne reprennent donc leurs travaux à Paris pour réfléchir à un nouveau train de sanctions contre l'Iran et à une troisième résolution. Le négociateur américain, Nick Burns, est présent aux entretiens et ne laisse en rien supposer qu'une nouvelle évaluation du renseignement risque de compliquer considérablement l'exercice. De fait, il …