Le Kosovo a proclamé son indépendance le 17 février 2008. Il est le sixième ex-membre de l'ancienne fédération yougoslave à franchir ce pas. Comme ses cinq prédécesseurs, le nouvel État a pris cette décision unilatéralement, après un référendum populaire et un vote parlementaire. Mais là s'arrêtent les ressemblances (1).
Deux des précédentes émancipations - Macédoine en 1991 et Monténégro en 2006 -, acceptées bon gré mal gré par le pouvoir central, ont fait peu de bruit. Mais pour les trois autres, alors refusées par Belgrade, chacun se rappelle combien d'événements tragiques les ont immédiatement suivies. La Slovénie et la Croatie en juin 1991, puis la Bosnie en mars 1992 ont subi dès le lendemain de leur geste des agressions militaires brutales et (sauf dans le cas slovène) longues et sanglantes, culminant avec le nettoyage ethnique et le génocide, les horreurs de Vukovar et de Srebrenica... Durant des années, les Balkans sont restés dans le monde entier la préoccupation majeure des politiques, le point de mire principal des médias et l'objet des plus ardentes controverses.
Rien de tel aujourd'hui. Le refus de Belgrade est plus radical encore qu'il y a seize ou dix-sept ans, la situation politique intérieure serbe en est profondément perturbée. Dans la vie internationale le débat reste actif. Mais, sur le terrain, trois mois après l'événement, on observe un calme inespéré : pas de violences ni d'un côté ni de l'autre ; l'exode que certains avaient craint ne s'est pas produit ; pour tous, majorité et minorités, la vie, certes difficile, continue comme avant. Et, de fait, les médias parlent peu du Kosovo, les télévisions l'ignorent, pour le grand public il n'existe pas.
On doit se réjouir de cette paix maintenue qui, pour le moment, fait mentir tant de Cassandres ; mais le « silence radio » est dangereux. La situation est mouvante, des décisions importantes ont été et seront encore prises, dont peut dépendre soit une amélioration progressive, soit le déclenchement de nouvelles tempêtes. Il importe que chacun soit éclairé sur une réalité particulièrement complexe.
Une décision inéluctable
L'opinion, dans la faible mesure où elle s'intéresse à l'événement du 17 février, a tendance à l'isoler de ses antécédents, à le réduire à sa pure instantanéité, qui est celle d'un fait juridique: le Kosovo, lit-on dans la presse, qui était jusque-là une « province serbe », se proclame aujourd'hui État indépendant. Il y a donc, disent certains, rupture du statu quo, sécession, modification d'une frontière reconnue, ce qui est contraire au droit international et crée un précédent dangereux.
Il est bien exact que le changement intervenu ce jour-là est de nature juridique. En revanche, il ne représente nullement une modificatrion du statu quo sur le terrain. Depuis la fin des opérations militaires en 1999, et la prise en charge du territoire par une administration internationale à la suite de la résolution 1244 du Conseil de sécurité, toute forme de pouvoir serbe, tout lien avec la Serbie avait été éliminé. Des institutions propres au Kosovo, avec un Parlement et …
Deux des précédentes émancipations - Macédoine en 1991 et Monténégro en 2006 -, acceptées bon gré mal gré par le pouvoir central, ont fait peu de bruit. Mais pour les trois autres, alors refusées par Belgrade, chacun se rappelle combien d'événements tragiques les ont immédiatement suivies. La Slovénie et la Croatie en juin 1991, puis la Bosnie en mars 1992 ont subi dès le lendemain de leur geste des agressions militaires brutales et (sauf dans le cas slovène) longues et sanglantes, culminant avec le nettoyage ethnique et le génocide, les horreurs de Vukovar et de Srebrenica... Durant des années, les Balkans sont restés dans le monde entier la préoccupation majeure des politiques, le point de mire principal des médias et l'objet des plus ardentes controverses.
Rien de tel aujourd'hui. Le refus de Belgrade est plus radical encore qu'il y a seize ou dix-sept ans, la situation politique intérieure serbe en est profondément perturbée. Dans la vie internationale le débat reste actif. Mais, sur le terrain, trois mois après l'événement, on observe un calme inespéré : pas de violences ni d'un côté ni de l'autre ; l'exode que certains avaient craint ne s'est pas produit ; pour tous, majorité et minorités, la vie, certes difficile, continue comme avant. Et, de fait, les médias parlent peu du Kosovo, les télévisions l'ignorent, pour le grand public il n'existe pas.
On doit se réjouir de cette paix maintenue qui, pour le moment, fait mentir tant de Cassandres ; mais le « silence radio » est dangereux. La situation est mouvante, des décisions importantes ont été et seront encore prises, dont peut dépendre soit une amélioration progressive, soit le déclenchement de nouvelles tempêtes. Il importe que chacun soit éclairé sur une réalité particulièrement complexe.
Une décision inéluctable
L'opinion, dans la faible mesure où elle s'intéresse à l'événement du 17 février, a tendance à l'isoler de ses antécédents, à le réduire à sa pure instantanéité, qui est celle d'un fait juridique: le Kosovo, lit-on dans la presse, qui était jusque-là une « province serbe », se proclame aujourd'hui État indépendant. Il y a donc, disent certains, rupture du statu quo, sécession, modification d'une frontière reconnue, ce qui est contraire au droit international et crée un précédent dangereux.
Il est bien exact que le changement intervenu ce jour-là est de nature juridique. En revanche, il ne représente nullement une modificatrion du statu quo sur le terrain. Depuis la fin des opérations militaires en 1999, et la prise en charge du territoire par une administration internationale à la suite de la résolution 1244 du Conseil de sécurité, toute forme de pouvoir serbe, tout lien avec la Serbie avait été éliminé. Des institutions propres au Kosovo, avec un Parlement et …
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