Le ton est volontairement ironique et cassant. Dans une lettre datée du 9 octobre 2008 et adressée à Jacob Zuma, le nouveau président du Congrès national africain (ANC), son prédécesseur Thabo Mbeki dresse la liste exhaustive des vénérables vétérans aux côtés desquels il a combattu. Un inventaire à la Prévert dont la conclusion sonne comme un avertissement : « Ils n'ont rien fait, et nous n'avons rien fait dans le cadre de la construction du mouvement de libération qui aurait conduit ce dernier à s'enfermer dans le culte de la personnalité » (1). Quelques pages plus loin, l'ancien président de la république sud-africaine insiste, rappelant les valeurs collectives de l'ANC à son successeur pressenti : « Cette révolution n'a absolument rien à voir avec les destins personnels de ceux qui, grâce à leur vertu ou par le hasard de l'Histoire, deviennent ses leaders à un moment donné » (2).La teneur de cette correspondance - qui peut surprendre venant d'un homme qui, il y a encore quelques mois, concentrait entre ses mains la plupart des pouvoirs - résume à elle seule l'atmosphère tendue, voire violente qui prévaut en Afrique du Sud à l'approche des élections générales du printemps 2009. Quinze ans après le premier scrutin multiracial et l'élection de Nelson Mandela, le pays s'apprête en effet à vivre un moment clé. En 2009, le tournant sera avant tout politique, avec la fin de la toute-puissance de l'ANC. Mais il sera aussi économique, les tenants d'une meilleure redistribution de la croissance commençant à donner de la voix.
5,7 millions de séropositifs
Quinze ans... En 2009 l'ANC achèvera son troisième mandat à la tête du gouvernement sud-africain, avec ses alliés du Parti communiste (SACP) et de la puissante fédération syndicale Cosatu. Sur le papier, c'est Kgalema Motlanthe, le président par intérim, qui remettra son fauteuil en jeu au cours du second semestre, mais c'est bien le bilan de neuf ans de présidence Mbeki qui sera jugé. Et pour celui qui fut pourtant l'incontestable artisan de la croissance économique, le verdict risque d'être sévère, en particulier sur un point.
Le constat est dramatique : avec 5,7 millions de malades, l'Afrique du Sud est le pays qui compte le plus grand nombre de séropositifs au monde. Une étude récente de l'Université Harvard accuse l'ancien président et son ex-ministre de la Santé, Mme Manto Tshabala-Msimang, d'être directement responsables de la mort de 365 000 personnes entre 2000 et 2005 (3). En cause : leur entêtement à nier, jusqu'en 2003, tout lien entre VIH et sida, et leurs réticences persistantes à admettre l'efficacité des antirétroviraux dans la lutte contre la maladie, au nom de l'anti-néocolonialisme et sous l'influence de biologistes « sceptiques » comme le docteur Peter Duesberg, selon lequel les antirétroviraux seraient plus mortels que le sida lui-même.
La distribution de ces médicaments dans les hôpitaux et les dispensaires publics a été décidée sur le tard et n'a véritablement débuté qu'en septembre 2004. Aujourd'hui, quelque 550 000 Sud-Africains suivent un traitement adapté. L'Afrique du Sud redresse …
5,7 millions de séropositifs
Quinze ans... En 2009 l'ANC achèvera son troisième mandat à la tête du gouvernement sud-africain, avec ses alliés du Parti communiste (SACP) et de la puissante fédération syndicale Cosatu. Sur le papier, c'est Kgalema Motlanthe, le président par intérim, qui remettra son fauteuil en jeu au cours du second semestre, mais c'est bien le bilan de neuf ans de présidence Mbeki qui sera jugé. Et pour celui qui fut pourtant l'incontestable artisan de la croissance économique, le verdict risque d'être sévère, en particulier sur un point.
Le constat est dramatique : avec 5,7 millions de malades, l'Afrique du Sud est le pays qui compte le plus grand nombre de séropositifs au monde. Une étude récente de l'Université Harvard accuse l'ancien président et son ex-ministre de la Santé, Mme Manto Tshabala-Msimang, d'être directement responsables de la mort de 365 000 personnes entre 2000 et 2005 (3). En cause : leur entêtement à nier, jusqu'en 2003, tout lien entre VIH et sida, et leurs réticences persistantes à admettre l'efficacité des antirétroviraux dans la lutte contre la maladie, au nom de l'anti-néocolonialisme et sous l'influence de biologistes « sceptiques » comme le docteur Peter Duesberg, selon lequel les antirétroviraux seraient plus mortels que le sida lui-même.
La distribution de ces médicaments dans les hôpitaux et les dispensaires publics a été décidée sur le tard et n'a véritablement débuté qu'en septembre 2004. Aujourd'hui, quelque 550 000 Sud-Africains suivent un traitement adapté. L'Afrique du Sud redresse …
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