Les Grands de ce monde s'expriment dans

WASHINGTON-MOSCOU : LA NOUVELLE DONNE

« Il est important pour nous de reprendre à partir de zéro les relations entre les États-Unis et la Russie. » Cette déclaration de Barack Obama, faite sur la chaîne NBC le 7 décembre 2008, résonne à la fois comme un désaveu cinglant et comme un programme ambitieux. Désaveu de l'administration sortante qui quitte le pouvoir après avoir - entre autres choses - profondément dégradé les rapports entre Washington et Moscou. Programme de la nouvelle équipe à l'égard d'un pays clé : le gouvernement d'Obama n'agitera pas le spectre d'un retour à la guerre froide, comme l'avait fait l'entourage de George W. Bush ; pour autant, il ne cédera pas à l'euphorie qui prévalait dans les années 1990, quand l'Amérique de Bill Clinton croyait que la Russie de Boris Eltsine était vouée à devenir rapidement une démocratie à l'occidentale... Après les certitudes idéologiques des années Bush vient donc l'heure du pragmatisme.À peine arrivée aux affaires, l'administration Obama se trouve engagée sur de multiples fronts. La gravité de la crise économique mondiale la contraint à allouer des ressources considérables à la stabilisation intérieure tout en répondant aux exigences de régulation des marchés financiers qu'expriment ses partenaires du G20 ; la perspective du retrait américain d'Irak masque mal la dégradation de la situation en Afghanistan et au Pakistan ; le dossier iranien conserve son potentiel déflagrant ; le conflit israélo-palestinien s'est aggravé après l'intervention de Tsahal dans la bande de Gaza ; au Caucase, la guerre de Géorgie de l'été 2008 a rappelé aux Européens que leur sécurité n'était jamais acquise, ce qui avive les débats sur l'élargissement de l'Otan et sur le projet américain consistant à installer des systèmes anti-missile en Europe de l'Est ; enfin, l'influence de la Chine sur la scène internationale ne cesse de croître.
Dans ce contexte éminemment complexe, un regain de tensions avec Moscou pourrait bien compliquer, un peu plus encore, la mission d'Obama. Les États-Unis ne peuvent ni ignorer la Russie ni en faire une priorité. Vis-à-vis de Moscou, leur politique semble désormais condamnée à une voie moyenne. Les Américains devront tenir compte d'au moins trois réalités. Une réalité géopolitique : la Russie est directement ou indirectement impliquée dans tous les grands dossiers internationaux en raison de sa position en Eurasie. Une réalité politique : le régime russe s'est durci depuis 2000, notamment en exploitant en interne la crise morale du modèle américain. Une réalité économique, enfin : la faiblesse des relations commerciales Washington-Moscou et l'impact que la crise mondiale a eu sur l'économie russe ne doivent pas occulter l'importance grandissante des compagnies russes dans les équilibres énergétiques globaux.
Pour Barack Obama, l'enjeu consiste non seulement à modifier l'atmosphère des relations américano-russes, mais aussi à identifier des sujets de coopération tout en instaurant un nouveau cadre d'échanges. Pour y parvenir, il devra relever deux défis. Le premier réside dans son aptitude à surmonter l'héritage des années Bush - une période qui, nous l'avons dit, a vu un net refroidissement des rapports entre la Maison Blanche …