Le 13 mai 2009, de petits groupes de manifestants se sont réunis devant les ambassades de l'Ouzbékistan à Moscou et à Washington. Comme tous les 13 mai depuis quatre ans, les participants - pour la plupart, des Ouzbeks résidant à l'étranger - exigeaient la « vérité sur le massacre d'Andijan ». Chaque année, le nombre de personnes présentes lors de ces rassemblements se réduit. Pour une raison toute simple : la peur. Comme le rappelle Daria Soboleva, membre de l'association de défense des droits de l'homme russe Mémorial, ces meetings sont très surveillés. Les activistes qui y prennent part sont répertoriés et, en guise de représailles, leurs familles demeurées au pays sont persécutées (1). L'Ouzbékistan, État le plus peuplé d'Asie centrale avec ses 27 millions d'habitants, est en effet une dictature particulièrement féroce depuis son indépendance acquise en 1991, à la suite de l'implosion de l'URSS. Et, après les événements du 13 mai 2005, la situation a encore empiré.Que s'est-il passé au juste, ce jour-là, à Andijan, quatrième ville du pays, située à son extrémité orientale, au coeur de la vallée de la Ferghana ? Les versions divergent largement. D'après les autorités, la police et l'armée ont repoussé une attaque conduite par une escouade d'islamistes surarmés. Cette attaque avait commencé le 12 mai par la prise de plusieurs bâtiments administratifs, dont la prison de la ville. 187 assaillants auraient été tués. Mais de nombreux observateurs contestent cette version et parlent plutôt d'un « Tiananmen ouzbek ». Plusieurs ONG, dont le Comité international de la Croix-Rouge, affirment que l'armée a dispersé avec une violence inouïe une manifestation pacifique, faisant entre 500 et 1 000 morts.
Ce qui est sûr, c'est que ce jour a profondément changé les rapports que Tachkent entretenait avec les grandes puissances. Au cours des quinze années précédentes, l'Ouzbékistan avait profité de sa position stratégique (et, en particulier, de son voisinage avec l'Afghanistan) et de ses richesses naturelles pour nouer des rapports satisfaisants aussi bien avec la Russie qu'avec les pays occidentaux. Le Kremlin, mais aussi Washington et les capitales européennes fermaient les yeux sur les exactions du régime de l'inamovible président Islam Karimov. Mais Andijan a changé la donne. L'administration Bush et l'Union européenne ont exigé une enquête internationale indépendante sur ces événements que l'Ouzbékistan persiste à considérer comme une affaire strictement domestique. Les États-Unis ont alors pris leurs distances vis-à-vis de ce pouvoir dictatorial. Quant à l'UE, elle a décrété des sanctions économiques. Islam Karimov a réagi en fermant les bases aériennes américaines se trouvant sur son territoire et en se rapprochant de la Russie et de la Chine, moins regardantes sur les questions de droits de l'homme.
En septembre de cette même année, les meneurs supposés de l'« attaque» d'Andijan ont été jugés et, à l'issue d'un procès tout à fait stalinien qui vit certains des accusés affirmer qu'ils méritaient d'être « tués deux fois », condamnés à de lourdes peines.
Depuis, le régime a encore durci le ton. Tandis que le clan Karimov se livre à une prédation toujours plus échevelée sur les ressources du pays, toute opposition a été définitivement muselée. Les répressions visant les quelques associations de la « société civile » encore en activité se sont multipliées, tout comme les arrestations arbitraires de journalistes. Les mouvements démocratiques ayant été démantelés depuis des années, le gouvernement estime que son adversaire le plus dangereux est à chercher parmi les islamistes locaux - qui auraient partie liée avec les talibans afghans. C'est pourquoi les autorités s'en prennent avec une férocité particulière aux croyants trop pratiquants et les emprisonnent en masse. Des milliers de prisonniers politiques, détenus principalement pour des motifs religieux mais aussi idéologiques, croupissent dans les geôles ouzbèques où, selon l'ONU, la pratique de la torture est systématique.
Moutabar Tadjibaeva est l'une des rares détenues politiques à avoir pu sortir vivante de cette « île de la torture » (selon sa propre expression). Saluée en Occident pour son courage et sa droiture, cette femme modeste mais dotée d'une volonté de fer est devenue le symbole de la lutte contre le système ouzbek. Cette journaliste, aujourd'hui âgée de 46 ans, n'était pourtant pas prédestinée à une vie de dissidente. Originaire de la ville de Ferghana - l'un des principaux points de transit du trafic d'héroïne afghane vers l'Europe -, elle a lancé, au début des années 2000, une association locale nommée « Club des coeurs ardents » destinée à combattre les ravages de la drogue dans son quartier. Ironie de l'histoire : à ses débuts, cette organisation bénéficiait du soutien des autorités, incapables de s'opposer à la toxicomanie. Mais, rapidement, les « Coeurs ardents » ont élargi leur champ d'action et ont commencé à défendre les droits des simples citoyens en butte à d'innombrables vexations de la part de la police. Une activité à risques dans un tel pays.
Quelques jours après le carnage du 13 mai 2005, Mme Tadjibaeva est arrêtée à son domicile pour avoir condamné la violence que les forces de l'ordre ont employée à Andijan. Elle est relâchée près soixante-douze heures de détention mais, en octobre, elle est une nouvelle fois mise sous les verrous. Un tribunal aux ordres du pouvoir la déclare coupable de dix-huit chefs d'accusation et la condamne à huit années de réclusion criminelle. Elle passera finalement 970 jours en prison, où elle subira de nombreuses tortures et humiliations. Mais les ONG étrangères qui suivent avec attention l'actualité de l'Ouzbékistan, au premier rang desquelles la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), attirent l'attention sur son cas et, à la suite d'une pression sans précédent de la communauté internationale (de nombreuses ONG de défense des droits de l'homme ainsi que plusieurs chancelleries occidentales, spécialement Paris et Washington, demandent sa libération), elle finit par être relâchée en août 2008, et est même autorisée à quitter le pays. Elle se voit alors décerner plusieurs prix prestigieux, comme le prix Martin Ennals, le 20 novembre 2008 (2) ; le prix des droits de l'homme de la République française, que la secrétaire d'État chargée des Affaires étrangères et des droits de l'homme, Rama Yade, lui remet le 10 décembre 2008 (3); ainsi que l'International Women of Courage Award (un prix attribué annuellement par le Département d'État américain) qu'elle reçoit des mains de Hillary Clinton et de Michelle Obama le 11 mars 2009 (4).
Depuis quelques mois, Mme Tadjibaeva se trouve en France, où elle suit un traitement pour se remettre de sa longue détention. Mais elle n'a pas l'intention de cesser le combat. En tant qu'ancienne prisonnière de l'« île de la torture », elle souhaite se consacrer à la défense des droits des détenus ouzbeks et continuer d'alerter l'opinion publique internationale sur la nature du régime et sur la situation du pays.
Après le massacre d'Andijan, les Ouzbeks ont perdu l'espoir de voir le pouvoir évoluer. La majorité de la population vit toujours dans la misère et sous la menace constante de l'arbitraire des autorités. À l'heure où les puissances occidentales semblent prêtes à reprendre contact avec Tachkent (5), il est donc essentiel d'entendre ce message : la démocratisation du pays est indispensable non seulement pour ses habitants mais, aussi, pour la stabilité de toute cette région dont l'importance stratégique n'est plus à démontrer. Ne serait-ce que parce que en écrasant ses administrés - ou, plutôt, ses sujets - sous sa botte de fer, le président Karimov contribue à la radicalisation de la société et, in fine, à la montée en puissance des islamistes.
Mme Tadjibaeva est convaincue que les démocraties, si elles s'en donnent vraiment la peine, peuvent contraindre la dictature ouzbèque à lâcher du lest. Sera-t-elle entendue ?
N. R. Natalia Rutkevich - Plus de quatre ans après les événements d'Andijan, ce drame fait toujours l'objet d'interprétations contradictoires. D'après les informations dont vous disposez, s'est-il agi d'un rassemblement démocratique ou d'un assaut islamiste ?
Moutabar Tadjibaeva - J'ai recueilli un grand nombre de documents et de témoignages concernant les événements du 13 mai 2005 et je peux vous dire avec une certitude absolue que la version des autorités - à savoir qu'il s'est agi d'une attaque terroriste, conçue et réalisée par quelque mystérieux groupe islamiste - est un mensonge total. La manifestation d'Andijan a été une action de protestation de la population contre la corruption et, plus généralement, contre une situation sociale et économique désastreuse. Un rassemblement pacifique dont le pouvoir a pris prétexte pour commettre un massacre et donner un tour de vis supplémentaire à la société.
N. R. - Dans quel contexte cette tragédie s'est-elle produite ?
M. T. - Pour le comprendre, il faut remonter à l'année précédente. En 2004, Kobeljon Abidov, le chef de l'administration locale d'Andijan, a été démis de ses fonctions et s'est vu interdire toute activité publique. Le plus probable, c'est qu'on ait dit à Karimov qu'Abidov avait des vues sur le fauteuil présidentiel... Il est vrai qu'Abidov pouvait faire valoir ses excellents états de service : il collaborait efficacement avec les entrepreneurs de la région, il avait fait construire des routes, des écoles, etc. Il avait même été décoré à plusieurs reprises par le gouvernement. Or dans un pays comme le nôtre, les dirigeants locaux ne doivent surtout pas se montrer trop efficaces : le président n'aime pas les têtes qui dépassent. Quoi qu'il en soit, Abidov a été remplacé par un homme dévoué à Karimov, Saïdoullo Begaliev. Ce dernier a immédiatement décidé de faire preuve d'autorité et a fait arrêter les anciens partisans d'Abidov, qui se trouvaient surtout parmi les chefs des grandes et moyennes entreprises. Il a donc fait incarcérer vingt-trois hommes d'affaires, sous l'accusation d'appartenance au groupe extrémiste Akromiya (6).
Il faut savoir que ces businessmen étaient des hommes très respectés dans la région : leurs entreprises employaient plusieurs centaines d'Andijanais. À la suite de leur arrestation, l'activité de ces entreprises s'est interrompue, des centaines de personnes sont restées sans emploi, et leurs familles ont perdu toute ressource.
N. R. - Ces hommes ont-ils été arrêtés seulement parce qu'ils étaient proches d'Abidov ?
M. T. - Pas seulement. Si le gouvernement a décidé de se débarrasser d'eux, c'est aussi parce que la population leur vouait un grand respect. D'ailleurs, quand leur procès a commencé, en février 2005, il y a eu des manifestations de mécontentement dans la société. Des rassemblements pacifiques ont été organisés sous les fenêtres du tribunal. Le 25 mars, un groupe d'Andijanais a adressé au président Karimov une lettre lui demandant de mettre fin aux poursuites visant les hommes d'affaires incarcérés. Ne recevant pas de réponse, ces gens se sont adressés à moi, puisque j'étais la responsable d'une influente organisation sociale. En avril, j'ai envoyé à …
Ce qui est sûr, c'est que ce jour a profondément changé les rapports que Tachkent entretenait avec les grandes puissances. Au cours des quinze années précédentes, l'Ouzbékistan avait profité de sa position stratégique (et, en particulier, de son voisinage avec l'Afghanistan) et de ses richesses naturelles pour nouer des rapports satisfaisants aussi bien avec la Russie qu'avec les pays occidentaux. Le Kremlin, mais aussi Washington et les capitales européennes fermaient les yeux sur les exactions du régime de l'inamovible président Islam Karimov. Mais Andijan a changé la donne. L'administration Bush et l'Union européenne ont exigé une enquête internationale indépendante sur ces événements que l'Ouzbékistan persiste à considérer comme une affaire strictement domestique. Les États-Unis ont alors pris leurs distances vis-à-vis de ce pouvoir dictatorial. Quant à l'UE, elle a décrété des sanctions économiques. Islam Karimov a réagi en fermant les bases aériennes américaines se trouvant sur son territoire et en se rapprochant de la Russie et de la Chine, moins regardantes sur les questions de droits de l'homme.
En septembre de cette même année, les meneurs supposés de l'« attaque» d'Andijan ont été jugés et, à l'issue d'un procès tout à fait stalinien qui vit certains des accusés affirmer qu'ils méritaient d'être « tués deux fois », condamnés à de lourdes peines.
Depuis, le régime a encore durci le ton. Tandis que le clan Karimov se livre à une prédation toujours plus échevelée sur les ressources du pays, toute opposition a été définitivement muselée. Les répressions visant les quelques associations de la « société civile » encore en activité se sont multipliées, tout comme les arrestations arbitraires de journalistes. Les mouvements démocratiques ayant été démantelés depuis des années, le gouvernement estime que son adversaire le plus dangereux est à chercher parmi les islamistes locaux - qui auraient partie liée avec les talibans afghans. C'est pourquoi les autorités s'en prennent avec une férocité particulière aux croyants trop pratiquants et les emprisonnent en masse. Des milliers de prisonniers politiques, détenus principalement pour des motifs religieux mais aussi idéologiques, croupissent dans les geôles ouzbèques où, selon l'ONU, la pratique de la torture est systématique.
Moutabar Tadjibaeva est l'une des rares détenues politiques à avoir pu sortir vivante de cette « île de la torture » (selon sa propre expression). Saluée en Occident pour son courage et sa droiture, cette femme modeste mais dotée d'une volonté de fer est devenue le symbole de la lutte contre le système ouzbek. Cette journaliste, aujourd'hui âgée de 46 ans, n'était pourtant pas prédestinée à une vie de dissidente. Originaire de la ville de Ferghana - l'un des principaux points de transit du trafic d'héroïne afghane vers l'Europe -, elle a lancé, au début des années 2000, une association locale nommée « Club des coeurs ardents » destinée à combattre les ravages de la drogue dans son quartier. Ironie de l'histoire : à ses débuts, cette organisation bénéficiait du soutien des autorités, incapables de s'opposer à la toxicomanie. Mais, rapidement, les « Coeurs ardents » ont élargi leur champ d'action et ont commencé à défendre les droits des simples citoyens en butte à d'innombrables vexations de la part de la police. Une activité à risques dans un tel pays.
Quelques jours après le carnage du 13 mai 2005, Mme Tadjibaeva est arrêtée à son domicile pour avoir condamné la violence que les forces de l'ordre ont employée à Andijan. Elle est relâchée près soixante-douze heures de détention mais, en octobre, elle est une nouvelle fois mise sous les verrous. Un tribunal aux ordres du pouvoir la déclare coupable de dix-huit chefs d'accusation et la condamne à huit années de réclusion criminelle. Elle passera finalement 970 jours en prison, où elle subira de nombreuses tortures et humiliations. Mais les ONG étrangères qui suivent avec attention l'actualité de l'Ouzbékistan, au premier rang desquelles la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), attirent l'attention sur son cas et, à la suite d'une pression sans précédent de la communauté internationale (de nombreuses ONG de défense des droits de l'homme ainsi que plusieurs chancelleries occidentales, spécialement Paris et Washington, demandent sa libération), elle finit par être relâchée en août 2008, et est même autorisée à quitter le pays. Elle se voit alors décerner plusieurs prix prestigieux, comme le prix Martin Ennals, le 20 novembre 2008 (2) ; le prix des droits de l'homme de la République française, que la secrétaire d'État chargée des Affaires étrangères et des droits de l'homme, Rama Yade, lui remet le 10 décembre 2008 (3); ainsi que l'International Women of Courage Award (un prix attribué annuellement par le Département d'État américain) qu'elle reçoit des mains de Hillary Clinton et de Michelle Obama le 11 mars 2009 (4).
Depuis quelques mois, Mme Tadjibaeva se trouve en France, où elle suit un traitement pour se remettre de sa longue détention. Mais elle n'a pas l'intention de cesser le combat. En tant qu'ancienne prisonnière de l'« île de la torture », elle souhaite se consacrer à la défense des droits des détenus ouzbeks et continuer d'alerter l'opinion publique internationale sur la nature du régime et sur la situation du pays.
Après le massacre d'Andijan, les Ouzbeks ont perdu l'espoir de voir le pouvoir évoluer. La majorité de la population vit toujours dans la misère et sous la menace constante de l'arbitraire des autorités. À l'heure où les puissances occidentales semblent prêtes à reprendre contact avec Tachkent (5), il est donc essentiel d'entendre ce message : la démocratisation du pays est indispensable non seulement pour ses habitants mais, aussi, pour la stabilité de toute cette région dont l'importance stratégique n'est plus à démontrer. Ne serait-ce que parce que en écrasant ses administrés - ou, plutôt, ses sujets - sous sa botte de fer, le président Karimov contribue à la radicalisation de la société et, in fine, à la montée en puissance des islamistes.
Mme Tadjibaeva est convaincue que les démocraties, si elles s'en donnent vraiment la peine, peuvent contraindre la dictature ouzbèque à lâcher du lest. Sera-t-elle entendue ?
N. R. Natalia Rutkevich - Plus de quatre ans après les événements d'Andijan, ce drame fait toujours l'objet d'interprétations contradictoires. D'après les informations dont vous disposez, s'est-il agi d'un rassemblement démocratique ou d'un assaut islamiste ?
Moutabar Tadjibaeva - J'ai recueilli un grand nombre de documents et de témoignages concernant les événements du 13 mai 2005 et je peux vous dire avec une certitude absolue que la version des autorités - à savoir qu'il s'est agi d'une attaque terroriste, conçue et réalisée par quelque mystérieux groupe islamiste - est un mensonge total. La manifestation d'Andijan a été une action de protestation de la population contre la corruption et, plus généralement, contre une situation sociale et économique désastreuse. Un rassemblement pacifique dont le pouvoir a pris prétexte pour commettre un massacre et donner un tour de vis supplémentaire à la société.
N. R. - Dans quel contexte cette tragédie s'est-elle produite ?
M. T. - Pour le comprendre, il faut remonter à l'année précédente. En 2004, Kobeljon Abidov, le chef de l'administration locale d'Andijan, a été démis de ses fonctions et s'est vu interdire toute activité publique. Le plus probable, c'est qu'on ait dit à Karimov qu'Abidov avait des vues sur le fauteuil présidentiel... Il est vrai qu'Abidov pouvait faire valoir ses excellents états de service : il collaborait efficacement avec les entrepreneurs de la région, il avait fait construire des routes, des écoles, etc. Il avait même été décoré à plusieurs reprises par le gouvernement. Or dans un pays comme le nôtre, les dirigeants locaux ne doivent surtout pas se montrer trop efficaces : le président n'aime pas les têtes qui dépassent. Quoi qu'il en soit, Abidov a été remplacé par un homme dévoué à Karimov, Saïdoullo Begaliev. Ce dernier a immédiatement décidé de faire preuve d'autorité et a fait arrêter les anciens partisans d'Abidov, qui se trouvaient surtout parmi les chefs des grandes et moyennes entreprises. Il a donc fait incarcérer vingt-trois hommes d'affaires, sous l'accusation d'appartenance au groupe extrémiste Akromiya (6).
Il faut savoir que ces businessmen étaient des hommes très respectés dans la région : leurs entreprises employaient plusieurs centaines d'Andijanais. À la suite de leur arrestation, l'activité de ces entreprises s'est interrompue, des centaines de personnes sont restées sans emploi, et leurs familles ont perdu toute ressource.
N. R. - Ces hommes ont-ils été arrêtés seulement parce qu'ils étaient proches d'Abidov ?
M. T. - Pas seulement. Si le gouvernement a décidé de se débarrasser d'eux, c'est aussi parce que la population leur vouait un grand respect. D'ailleurs, quand leur procès a commencé, en février 2005, il y a eu des manifestations de mécontentement dans la société. Des rassemblements pacifiques ont été organisés sous les fenêtres du tribunal. Le 25 mars, un groupe d'Andijanais a adressé au président Karimov une lettre lui demandant de mettre fin aux poursuites visant les hommes d'affaires incarcérés. Ne recevant pas de réponse, ces gens se sont adressés à moi, puisque j'étais la responsable d'une influente organisation sociale. En avril, j'ai envoyé à …
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