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CHINE : LES FLEURS FANEES DE LA REVOLUTION

Le 1er octobre 2009, la République populaire de Chine a fêté ses soixante ans. Sans doute plus que tous les anniversaires précédents, cette célébration aura été l'occasion de poser des questions douloureuses. Théoriquement, il fallait commémorer soixante années d'un « passé glorieux » et déclarer que l'avenir le serait plus encore. Pourtant, nombreux sont ceux qui, du bas en haut de l'échelle sociale, se demandent pourquoi la Chine a, au fond, si peu évolué. Pourquoi le parti communiste est-il resté le parti unique et intolérant de ses débuts ? Pourquoi les succès économiques n'ont-ils pas entraîné de véritables réformes politiques ? Et que sont devenus les beaux idéaux de jadis ? Comment la Chine de Mao a-t-elle pu se muer en grande puissance sans renier son passé ? Il aura fallu plus de soixante-dix ans de pouvoir ininterrompu au parti communiste de l'URSS avant qu'il s'écroule. Le PCC s'apprête sans doute à battre ce record, et les Chinois se retournent aujourd'hui sur ce long passé en se demandant ce qu'ils doivent en conserver. Devenue l'une des plus grandes puissances économiques de la planète, la Chine suscite bien des envies, que ce soit parmi les investisseurs occidentaux qui espèrent bénéficier de son aide pour sortir de la crise, ou parmi les pays en voie de développement qui y voient un modèle original, à l'opposé du modèle dominant américain. Les Chinois le disent eux-mêmes avec ironie : « En 1949, seul le socialisme pouvait sauver la Chine. En 1979 (et le début des réformes économiques), seul le capitalisme pouvait sauver la Chine. En 2009, seule la Chine peut sauver le capitalisme. » Pourtant, à l'intérieur du pays, ce succès économique incontestable ne donne pas lieu à des réjouissances excessives.
Soixante ans d'immobilisme ?
Durant l'été 2009, un texte signé d'un mystérieux « vieux camarade » a fait la « une » des sites fréquentés par les Chinois sur Internet. Même s'il est difficile d'affirmer l'authenticité du texte qui se présente sous forme d'interview, les propos tenus reflètent très probablement la pensée de nombreux leaders d'opinion au sein du PCC. Certains affirment qu'il s'agit de Wan Li, ancien président de l'Assemblée nationale populaire. Il est vrai que les cadres retraités sont désormais nombreux à rédiger leurs mémoires pour apporter leur témoignage aux futurs historiens. Le « vieux camarade » a des mots assez durs pour les dirigeants actuels : « Je suis un vieil homme qui a travaillé toute sa vie pour l'État et pour le parti, écrit-il. Je ne peux pas m'empêcher de rester sentimentalement attaché à mon passé, mais je ne peux tout de même pas être d'accord avec des expressions comme les "soixante années glorieuses" ou les "cinquante années glorieuses". Ce sont des expressions mensongères. Les années du Grand Bond en avant, de la Révolution culturelle n'étaient pas "glorieuses". Même lorsqu'on fait de la propagande, il faut prendre soin de rester fidèle aux faits. Si l'on élimine ces années-là, les gens vont les gommer de leur coeur, et les historiens …