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GRAND NORD : LA NOUVELLE FRONTIERE

Il n'existe pas de continent arctique : cette zone n'est qu'un immense bloc de glace en train de fondre, au milieu de l'océan de l'Atlantique Nord. Cinq pays la bordent : les États-Unis, le Canada, la Russie, la Norvège et le Danemark (qui possède le Groenland, la deuxième île la plus grande au monde après l'Australie). Cette région polaire est entrée tardivement dans l'histoire humaine. Outre quelques opérations militaires durant les deux guerres mondiales, c'est le début de la guerre froide et de la rivalité entre les États-Unis et l'URSS qui va progressivement l'incorporer à la géopolitique planétaire. Si une guerre nucléaire avait dû se déclencher, c'est par le pôle Nord que les missiles soviétiques ou américains seraient passés. D'où la militarisation du Groenland avec la création de la base américaine de Thulé. Quant à l'Union soviétique, elle avait mis au point de nouveaux brise-glace perfectionnés qui lui permettaient de relier plus rapidement son Extrême-Orient par cabotage le long du littoral nord de la Sibérie, dans les eaux glacées de l'Arctique.La course à l'Arctique
La course à l'Arctique que nous connaissons depuis peu se déploie sur trois plans distincts. Le premier est la recherche du raccourcissement des liaisons maritimes entre l'Europe, l'Amérique du Nord et l'Asie du Nord. La fonte des glaces permet, en effet, d'envisager le transit des navires à travers le Grand Nord canadien. Ce projet, qui est observé avec prudence par les compagnies maritimes en raison des risques d'icebergs pouvant mettre en péril les navires, est à l'origine d'une brouille diplomatique, ce futur passage étant considéré par Ottawa comme une voie d'eau intérieure et par Washington comme une voie d'eau internationale. L'enjeu n'est pas seulement une question de souveraineté ; c'est aussi un problème financier, le Canada pouvant être tenté de percevoir un droit de péage sur la fréquentation de cette nouvelle route maritime. Si l'Arctique fond plus rapidement que prévu, les états-majors et les compagnies de navigation restent néanmoins réservés, car cette nouvelle route interocéanique traverserait des zones quasiment désertiques qui rendraient impossible l'installation des infrastructures nécessaires en cas d'accident ou de naufrage.
Le deuxième plan est l'aspect stratégique qui, paradoxalement, a été considérablement renforcé depuis la fin de la guerre froide. Les Américains ont réaménagé l'immense base de Thulé à partir de laquelle ils contrôlent non seulement l'Europe et la Russie, mais aussi le Proche et le Moyen-Orient. Les données recueillies sont traitées en temps réel par des analystes situés en Floride ou au Dakota. Cette base est devenue un maillon essentiel du projet de bouclier antimissile et un haut lieu de l'espionnage électronique planétaire.
Le troisième élément - le plus important - est bien entendu l'énergie. De vastes gisements de pétrole et de gaz ont été mis au jour, ou sont en voie d'identification, dans le sous-sol de l'Arctique. Ces découvertes posent un problème de délimitation des fonds sous-marins dont le meilleur exemple est l'immersion par la Russie, il y a deux ans, d'un drapeau sur la dorsale de Lomonossov par 4 500 mètres …