Les Grands de ce monde s'expriment dans

DE LULA A DILMA...

En octobre 2010, la république fédérative du Brésil terminait de recenser ses 191 millions d'habitants. Au même moment, 71 % d'entre eux, âgés de 16 ans ou plus, étaient appelés aux urnes. Selon des modes de scrutin parfois différents, mais toujours au suffrage universel direct, ils devaient désigner les principaux titulaires des pouvoirs exécutif et législatif : le nouveau président de la République, les 513 sièges de la Chambre des députés et les deux tiers de ceux du Sénat. Et pour les 26 États fédérés et le District fédéral (Brasília), ils étaient conviés à choisir le gouverneur et à renouveler l'Assemblée locale. Au total, 1 654 mandats étaient en jeu. De ces cinq compétitions simultanées, la présidentielle fut évidemment la plus observée. Longtemps donnée gagnante dès le premier tour, Dilma Rousseff, 63 ans, a finalement été élue... au second tour avec 56 % des suffrages exprimés (pour un taux de participation de 79,5 %). Durée de son mandat : quatre ans, renouvelable une fois. Elle a succédé, le 1er janvier 2011, au très populaire Luiz Inácio Lula da Silva, communément appelé Lula depuis sa jeunesse, élu en 2002 puis réélu en 2006 et qui ne pouvait donc pas briguer un troisième mandat consécutif. Bien qu'elle n'ait auparavant obtenu aucun mandat électif, Dilma Rousseff jouit d'une grande expérience des tâches exécutives : elle fut, en effet, ministre des Mines et de l'Énergie de 2002 à 2005, puis chef de la Casa civil (mixte de secrétariat général du gouvernement et instance de pré-arbitrages) de 2005 à 2010 et, à ce titre, bras droit du président Lula. L'accession au Planalto (l'Élysée brésilien) de celle que la presse et la population appellent déjà « Dilma » est d'abord un succès personnel pour Lula, qui en avait fait sa dauphine. Tous deux appartiennent à la même formation : le Parti des Travailleurs (PT), créé en 1980, et passé au fil des ans de la gauche radicale à une gauche modérée. Il en est l'un des co-fondateurs et le chef historique ; elle en est membre depuis 2000. En ce sens, la continuité l'emporte, d'autant que Dilma a promis de poursuivre la politique de son illustre prédécesseur. L'un et l'autre ont pratiquement le même âge (elle est de deux ans sa cadette) et, sur le plan symbolique, une dominée - une femme - succède à un dominé - un ancien ouvrier. Certes, Dilma est issue d'une famille aisée de Belo Horizonte (capitale du Minas Gerais, l'un des États les plus prospères du pays) et a fréquenté des lycées réputés, tandis que lui est le fils de paysans analphabètes contraints de fuir leur village déshérité de la région Nordeste (la plus pauvre du Brésil) et n'a pour tout diplôme qu'un certificat d'études. Mais, de même qu'en 2003 la présidence échappait pour la première fois en 120 ans de république aux gens de bonne condition, en 2010 l'arrivée de Dilma au Planalto interrompt un très long défilé d'hommes (ils sont 39 à l'avoir précédée à ce poste). Est-ce …