Les Grands de ce monde s'expriment dans

DIPLOMATIE FRANCAISE : LA CONFIANCE RETROUVEE

Baudouin Bollaert - Le Quai d'Orsay est un ministère que vous connaissez bien et que vous aimez. Dans quel état l'avez-vous trouvé en acceptant de succéder à Michèle Alliot-Marie ? Alain Juppé - C'est vrai, j'ai conservé un souvenir marquant de mon premier passage au Quai d'Orsay, même si l'actualité internationale de l'époque, dominée par la guerre dans les Balkans, donnait peu d'occasions de se réjouir. J'apprécie de travailler avec nos diplomates, qui accomplissent avec passion une tâche difficile, méconnue et indispensable. Il est toujours gratifiant d'essayer de faire avancer la cause de la paix et de la démocratie, et de contribuer au rayonnement de la France. Je ne reviens pas au Quai d'Orsay avec un esprit nostalgique, mais avec la volonté d'agir dans un monde dont nous voyons chaque jour davantage qu'il demeure imprévisible. Comme j'avais eu l'occasion de le souligner au mois de juillet dernier dans une tribune cosignée avec Hubert Védrine, notre diplomatie souffre depuis plusieurs années d'une réduction drastique et régulière de ses moyens d'action - et cela, au détriment de notre influence internationale. C'est pourquoi notre diplomatie, l'une des premières du monde, doit retrouver confiance en elle-même et doit disposer de moyens suffisants. J'y veillerai. B. B. - Quels sont les hommes d'État - morts et vivants - dont vous vous sentez le plus proche par les convictions ? Ceux, éventuellement, dont l'exemple vous inspire ? A. J. - Montesquieu, pour son esprit de modération, mais aussi pour sa réflexion sur l'organisation des pouvoirs. Et puis, bien sûr, le général de Gaulle, pour l'idée de la France qu'il a portée dans les jours les plus noirs de notre Histoire, pour sa vision d'une République juste et efficace, pour son sens de l'intérêt général, allié à une formidable capacité politique - ce qu'on appellerait aujourd'hui le « leadership ». J'ajouterai Nelson Mandela qui, imperméable à toute rancune, a su faire souffler sur son pays l'esprit de réconciliation. B. B. - À quelle personnalité non française donneriez-vous, aujourd'hui, le prix du courage politique ? A. J. - J'ai été très impressionné par le courage et la maturité des jeunes Égyptiens que j'ai longuement rencontrés sur la place Tahrir. Mais si je devais remettre le prix du courage politique, c'est à tous ceux, connus ou inconnus, qui luttent pour la paix et la démocratie, parfois au péril de leur vie, que je l'accorderais. Parce qu'ils nous apprennent chaque jour la valeur du bulletin de vote que nous avons, nous, le droit de glisser librement dans l'urne. Ne l'oublions jamais. B. B. - Que pensez-vous du drame qui frappe le Japon ? A. J. - Le peuple japonais, par son calme et sa détermination face à l'adversité, vient de donner une leçon au monde entier. Quand je vois son courage et sa ténacité, je suis convaincu que le Japon se relèvera. Nous serons, pour notre part, aux côtés de ce pays ami. La France a mobilisé des moyens importants pour aider la population et le gouvernement japonais. Nous continuerons …